PUB ROCK MONSTERS - UN PANORAMA EUROPEEN - 1ère PARTIE
Le Pub Rock demeure mésestimé malgré l’influence cruciale qu’il exerce depuis le début des années 70 sur l’ensemble de la scène rock.
Les explications sont nombreuses: période sous la lumière médiatique très brève, faiblesse du succès commercial ou public, difficulté à le définir.
Il convient donc de lui restituer toute la place qu’il mérite et de rendre hommage à une collection d’artistes portant haut le drapeau du vrai rock’n’roll.
Un petit peu d’histoire pour commencer:
Au début des années 70, le rock est devenu une hydre boursouflée qui se vautre dans des stades démesurés, se repait de solos au kilomètre et de stars pathétiques, le tout piloté par des maisons de disques sans vision.
Certains pensent alors qu’il est temps de redonner au rock sa vitalité et sa simplicité d’antan et de renouer un contact direct avec son public.
Ils veulent remettre au goût du jour le rock véritable, principalement celui venant des Etats-Unis.
Ils n’ont pas de moyen mais de la volonté et des idées.
A cette époque, à Londres, les pubs accueillent sans grand succès des groupes de jazz.
Un groupe appelé Eggs Over Easy décide de proposer au propriétaire du pub « Le Tally Ho » de se produire dans son établissement prétendant jouer du jazz.
Le Tally Ho |
Un entreprenant manager, Dave Robinson, prend la mesure des possibilités de concerts offertes aux groupes et organise une structure plus efficace mettant en place une tournée des pubs où les groupes sont « en résidence » un ou plusieurs soirs par semaine.
La « scène » pub rock est née. Quelques journalistes rendent compte de la qualité des concerts et de l’ambiance rock de ces lieux. La mayonnaise prend et des groupes de tout style (country rock, R&B, funk etc…) investissent cette scène. Les maisons de disques sautent dans le train en marche et des groupes obtiennent des contrats et produisent des disques.
Dave Robinson |
C’est ainsi qu’un groupe issu de Canvey Island, une commune située sur l’estuaire de la Tamise à une cinquantaine de kilomètres
de Londres, entre en scène. Il s’agit de Dr. Feelgood.
Mené par deux leaders charismatiques, Lee Brilleaux et Wilko Johnson, le groupe propose un répertoire vitaminé ancré dans le rock’n’roll et le rhythm’n’blues des origines. Rapidement, il conquiert une audience enthousiaste et signe avec United Artists.
Leur style de prolos élégants, leurs prestations scéniques enfiévrées et leur rock concis et énergique aux riffs tranchants et à l’harmonica déchaîné allaient devenir le modèle et la référence de ce qui allait devenir le style pub rock.
Parallèlement, des artistes émergent, des structures se créent apportant un sang neuf et de nouvelles méthodes de promotion.
Graham Parker, Elvis Costello, Sean Tyla et Nick Lowe apportent un vent de fraîcheur en ouvrant la porte à ce qui allait devenir la new wave. Dave Robinson et Jake Riviera créent le label indépendant Stiff Records en partie grâce à de l’argent prêté par Lee Brilleaux. Leurs méthodes provocantes de publicité serviront de terreau au « Do it yourself » prôné par le punk. D’autres maisons de disques indépendantes voient le jour comme Chiswick Records dirigé par Roger Armstrong et Ted Caroll.
Dr. Feelgood |
La bonne parole pub rock ne se cantonne pas à l’Angleterre. Du Havre (le Canvey Island Français) arrive Little Bob Story qui aujourd’hui encore est le parrain de la scène rock française dont les héritiers respectueux demeurent toujours nombreux. Il suffit de traverser la mer du Nord pour aborder les côtes Néerlandaises où les Bintangs délivrent depuis des années un rock ardent. La plus lointaine Finlande n’est pas en reste avec les Hurriganes.
Little Bob Story |
L’influence de Dr. Feelgood traverse aussi l’océan Atlantique où leur premier disque ramené par Clem Burke, le batteur de Blondie enthousiasme la scène punk New Yorkaise naissante. (Les Ramones feront d’ailleurs la première partie des Feelgoods)
En Angleterre, les futurs leaders de la scène punk (Johnny Rotten, J.J. Burnel etc…) sont dans les premiers rangs des concerts de pub rock et Joe Strummer se fait les dents avec son groupe pub rock, les 101 ers.
The Pirates |
Les adeptes d’un pub rock hargneux comme les Ducks Deluxe, les Pirates ou Eddie & The Hot Rods ouvrent la voix au punk qui bientôt submerge la scène pub rock même si Dr. Feelgood continue de porter haut le flambeau.
La scène punk est éphémère et la new wave prend rapidement la place au sein de laquelle les anciens pub rockers tiennent une place de choix (Motors, Graham Parker & The Rumour, Rockpile, Elvis Costello, Sean Tyla…
The Godfathers |
A la fin des années 70 et au début des années 80, les Inmates, Nine Below Zero et les Godfathers notamment remettent sur la table les revigorantes recettes (mélange de rock’n’roll, de blues et R&B) défendues par Dr. Feelgood,. Ils maintiennent vivant ce qui est devenu avec le temps le style pub rock.
The Inmates |
Jusqu’à nos jours des groupes continuent à défendre les valeurs d’énergie et de simplicité véhiculées par le pub rock aussi bien en Scandinavie (Refreshments, Doctor's Order...), en Italie (Giuda) ou en Serbie (Optimal Problem).
Giuda |
Dans les épisodes suivants, nous essaierons de donner un panorama du pub rock tant pour la période des années 70 (scène pub rock), en tentant de tenir compte du foisonnement des collaborations et des échanges.
En ce qui concerne ce qui est devenu le style pub rock nous parcourrons l’Europe pour démontrer son influence persistante sur ce continent.
Les groupes Américains et Australiens animant des scènes spécifiques et différentes dans ces pays (bar rock aux Etats Unis, pub rock sous une autre forme en Australie) sortent du champ de notre propos.
The Refreshments |
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