DEMENTED ARE GO par Olivier Fenestraz


 

Si vous n'êtes pas un fan de psychobilly, ce nom ne vous dit peut-être rien. Pourtant, ce groupe anglais existe depuis plus de quarante ans. Quarante ans que Sparky, le chanteur et dernier membre original du groupe, fait le tour du monde pour distiller son psychobilly aux fans de ce genre musical un peu à part. Car oui, le psychobilly est, comme je viens de le dire, un peu à part. Faisons une petite digression historique pour les plus jeunes qui n'ont peut-être pas tous les codes de ce mouvement alternatif. Le psychobilly, fréquemment abrégé en "psycho", est issu d'un sous-genre musical qui mélange le rock'n'roll, le rockabilly, le punk et même parfois le hard-core. Les textes parlent souvent de monstres, dont certains sacrés, hé hé, de vampires, d'extra-terrestres et de toute sorte de créatures étranges. Et puis des gens aussi, mais des gens aux goûts bizarres, pas vraiment "gendre idéal".


Au niveau du look, les psychos ont aussi mélangé les styles en fusionnant habilement la crête des punks avec la banane des rockers, ou inversement. Résultat, les psychos et les psychettes arborent des espèces de tremplins taillés au millimètre et souvent colorés, dont certains pourraient servir de pistes d'atterrissage pour insectes en perdition.

Pour ce qui est de savoir qui a inventé le psycho, les réponses divergent. Il y en a qui disent que ce sont "The Sonics" avec leur tube bien à propos intitulé tout bêtement "Psycho" paru en 1965. D'autres soutiennent que c'est l'homme orchestre Hasil Adkins et son célèbre "She Said" paru un an plus tôt. Et puis il y en a qui affirment que ce sont "The Cramps" avec leur hit "Human Fly". Difficile de trancher, surtout qu'il y a aussi "The Meteors", qui eux clament carrément haut et fort que "Only The Meteors Are Pure Psychobilly". En tout cas, une chose est sûre, ce n'est pas Demented Are Go qui a inventé le psychobilly.

Tant mieux, comme ça je vais pouvoir reprendre le cours de cette chronique qui est, au départ, censée parler de Demented Are Go (DAG).


Donc, DAG a démarré au début des années 80 en Angleterre. Ils ont sorti leur premier album intitulé "In Sickness and In Health" en 1986. Et comme premier morceau de ce disque, DAG a adapté en version psycho, "Be Bop A Lula". Il fallait oser s'attaquer à ce fleuron du rock'n'roll. Surtout comme entame de son premier disque. Mais ils l'ont fait avec brio. Franchement, ça dépote ! Par contre, il serait intéressant d'ouvrir le cercueil de Gene Vincent pour voir s'il s'est retourné dans sa tombe en entendant cette reprise.


Par la suite, DAG a sorti une dizaine d'albums et tourné dans le monde entier. Notamment en Europe, en Russie, au Japon et sur le continent américain. 40 années sur scène presque sans pause. Par contre, le line-up a souvent changé durant toutes ces années, mais depuis environ quinze ans, Sparky semble avoir trouvé la formule pour conserver ses musiciens. Ainsi, Grisha tient la contrebasse depuis 2007, Holger gratte la guitare depuis 2010, et enfin Gaybeul tape sur la batterie depuis 2013. Je signale au passage que Grisha et Holger sont allemands et Gaybeul français. Ce qui fait que quand on dit que DAG est un groupe anglais, mouais, plus vraiment en fait, surtout que Sparky vit en Hollande depuis très longtemps. Pourquoi en Hollande ? Devine ! D'ailleurs, moi aussi, j'aimerais bien y vivre dans ce pays où l'herbe est plus verte. Enfin bref, fermons la parenthèse.


Comme je le disais, DAG a sorti de nombreux albums tout au long de sa carrière, pourtant il s'est passé treize longues années entre l'avant-dernier, "Welcome Back to Insanity Hall" (People Like You) sorti en 2012, et le tout nouveau "Psychotic Mutilation" (Sunny Bastards) sorti en juillet 2025. Un album attendu par les fans depuis des lustres. DAG a en parallèle sorti deux mois plus tôt le single "Black Valium" (Bad Billy Records), morceau présent sur l'album. Ils ont en outre tourné un clip vidéo à Essen, pour accompagner ce single.

Et que dire de cet album enregistré en Allemagne, au Red Room studio ? J'hésite entre un "bijou", un "trésor", une "merveille" ou plus simplement, une réussite. Bon, ok, je dois enfin vous l'avouer, je suis un grand fan de DAG depuis mes jeunes années, alors mon jugement ne peut pas être 100% objectif, mais franchement, on peut dire qu'après treize ans de disette, c'est un retour gagnant. En cinq jours de studio, DAG nous offre treize chansons de pur psychobilly avec un équilibre parfait entre rock'n'roll, rockabilly et punk.

Et tout y est. Le son est propre et bien mixé. Le slap de la contrebasse est une merveille, la guitare électrique est vibrante et les riffs sont bien sentis. Et la batterie est carrée et rythme le tout sans accroc. Enfin, la voix de Sparky est comme toujours rauque à souhait et ses cris semblent capables d'ouvrir les portes de l'enfer.


Alors pour ceux qui ne connaissent pas le psycho et qui veulent y entrer par la grande porte, cet album de Demented Are Go vous donne la clé, ou plutôt le trousseau entier car vous aurez un panel complet de ce qu'est le psychobilly.

Pour les autres, vous savez ce qu'il vous reste à faire. Courir chez votre disquaire et vous procurer cet opus de haut vol et rentrer chez vous direct, mettre la galette sur votre platine et l'écouter en boucle.

Dernière précision, l'album vinyle existe en différentes couleurs et en picture disc.



Olivier Fenestraz




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