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MUSCLE SOULS - Part 1

Il existe plein de bouquins et de documentation sur le soul triangle Muscle Shoals, Memphis et Nashville : notamment des ouvrages sur les studios FAME, American Sound Studio et leurs propriétaires / producteurs respectifs, Rick Hall et Chips Moman. Dan Penn est plus ou moins cité dans tous ces livres, et plus particulièrement dans It Came From Memphis de Robert Gordon, l’auteur (2005, update en 2020), à n’en point douter le meilleur de tous.

Dan Penn, en tant que monstre sacré (dig it?), va donc servir de fil rouge à cette petite série d’articles, à travers les différents studios où il a œuvré : FAME à Muscle Shoals, American Sound Studio à Memphis et les siens, Beautiful Sounds (70’s) à Memphis et Dandy (2000 à ce jour) à Nashville. Quatre ou cinq volets, dont le premier, celui-ci, consacré à une brève présentation de Dan Penn.



Comment présenter Dan Penn ? Pour la pop, le rock, le rock’n’roll, il y a eu les big bangs Lennon - McCartney, Jagger - Richards, Lou Reed – John Cale, …

Dan a beaucoup fréquenté et appris d’Arthur Alexander, d’où les noms cités dans le paragraphe précédent. En effet, la première fois qu’ils sont entrés en studio, les Beatles et les Rolling Stones ont chacun enregistré un morceau d’Arthur Alexander (Anna et You Better Move On). Lou Reed a par ailleurs déclaré que s’il avait écrit une chanson aussi parfaite que I’m Your Puppet, il aurait arrêté de composer. Puppet ayant été composé par le big bang Dan Penn – Spooner Oldham. Dewey Lyndon, dont on reparlera fréquemment, a été affublé du surnom Spooner par ses copains après qu’il ait perdu son œil droit, par maladresse, à cause d'une cuiller.

Une des compiles consacrées aux chansons de Dan et Spooner

Voilà pour situer le niveau.

Daniel Pennington est né en novembre 1941, près de Vernon dans l’Alabama. Son père et son grand-père jouaient de la guitare et sa mère du piano. Il commence à jouer de la guitare à 9 ans, mais c’est quand son père lui offre une Gibson pour ses 16 ans que les choses sérieuses commencent. Ses parents écoutaient du gospel, mais c’est en écoutant WLAC radio (Nashville), sur un petit transistor vert planqué sous les draps, que Dan Penn découvre ses premiers héros : Ray Charles, Bobby Blue Bland, Jackie Wilson, Ben E King, … Les chroniqueurs compareront d’ailleurs souvent le timbre de voix de Dan à celui de Ben E King.



 Avant de composer pour d‘autres, Dan Penn commence sa carrière en tant que chanteur, avec Benny Cagle and the Rhythm Swingsters (en 1956), puis Mark V, The Fairlanes, Danny Lee & The Nomads et Dan Penn & The Pallbearers (ils trimbalaient leur matos dans un corbillard). Il sort son premier single solo en 1959.

   

Dan Penn & The Pallbearers

Un de ses premiers morceaux, Is A Blue Bird Blue?, sera un hit pour Conway Twitty. Si cette chanson ne vous dit rien, vous avez forcément eu l’occasion d’entendre quelques-unes de ses compositions, comme Dark End Of The Street (j’ai dénombré plus de 300 versions de ce morceau), Do Right Woman, Do Right Man (Aretha Franklin, parmi 200 autres), You Left The Water Running (Big O Redding), Cry Like A Baby (Box Tops), Rainbow Road (big A Alexander), ou I’m Your Puppet.  On reviendra sur ces morceaux.

Dan est l’auteur ou co-auteur (il préfère composer à plusieurs) avec Spooner Oldham, Chips Moman ou Donnie Fritts de toutes ces chansons, ainsi que de plus de 500 autres, rendues populaires par d’autres artistes. Mais les versions de ces chansons par Dan, bien que qualifiées de démos, surpassent la plupart du temps les versions connues. Il existe deux compiles ACE de ces démos, enregistrées à Muscle Shoals, avant que Dan aille s’installer à Memphis (1967) et produise notamment The Letter et Cry Like A Baby pour les Box Tops, le groupe du très jeune Alex Chilton.

Dan Penn a sorti quelques singles durant les 60’s, parfois sous un pseudo, avant de sortir un premier album Nobody’s Fool en 1972, cet album étant l’un des meilleurs que j’aie jamais écouté, tous styles confondus : les compositions, le son, les mélodies, les paroles, tout est parfait. Elvis Presley avait la chanson titre Nobody’s Fool dans sa liste de choses à faire.

Dan n’a sorti que deux autres « vrais » albums (selon ses critères) : Do Right Man en 1994 – album dans lequel il revisite certains de ses classiques, et Living On Mercy, une autre merveille sortie il y a deux ans, dans laquelle figure Edge Of Love, un morceau que les Rolling Stones auraient à coup sûr aimé composer.



Dan a aussi sorti, sur son label Dandy, ce qu’il appelle des albums de démos. Six en tout depuis 2000. Le dernier, sorti l’été dernier, uniquement au Japon semble-t-il, est intitulé Prodigal Son. C’est un album qu’on peut qualifier de gospel avec groove. Contrairement à Bob Dylan, Dan a gardé sa voix et ses chansons ont toujours des mélodies.

Démos ! 99,99 % des chanteurs ou groupes aimeraient avoir sorti un album de cette qualité durant leur carrière.



Les anglais célébreront Dan Penn lors du prochain Record Store Day, en avril, avec la sortie d’un LP d’unheard demos – c’est le nom du disque, enregistré entre les fabuleuses sessions de l’album de Solomon Burke Don’t Give Up On Me et celui de Bobby Purify Better To Have It. Entre 2002 et 2004, donc. Pour le premier, Dan Penn a notamment composé le morceau titre de l’album. Pour le deuxième, il a composé tous les morceaux, dont on devrait en retrouver certains sur Unheard Demos, il a produit l'album, s'est occupé des arrangements, etc.


Dan Penn et Spooner Oldham sont également nominés pour le songwriters Hall of Fame, qui se tiendra le 15 juin prochain à New York.

2023, l’année Dan Penn ? Enfin !

À suivre : la période Muscle Shoals

Patrick Bainée (merci d'avance pour vos commentaires !)

  

Commentaires

Jacques_B a dit…
Les deux compiles ACE sont pour moi absolument magistrales, je les préfère aux albums plus tardifs de Dan Penn. J'attends la suite de l'histoire avec l'impatience proverbiale que l'on sait !