INTERVIEW - PITSHARK

 


Bonjour Pitshark, j'entre directement dans le vif du sujet : comment en arrive-t-on à s'occuper d'un label comme le tiens?

Ça n'arrive pas d'un coup... D'abord j'ai acheté et collectionné de disques. Et puis dans le genre que j'écoute, (garage-punk-rock) il y a beaucoup de ''do it yourself'', alors forcément, ça donne des idées. Même si ce sont des idées que d'autres ont déjà eu et ont mis en pratique, on a envie de faire pareil, en espérant faire aussi bien que les autres... J'ai commencé par un fanzine, puis un autre... Et un jour, un de mes amis a monté un petit label et à sorti des disques... Fred, de Ghostrider records, m'a donc montré que c'était possible... Il m'a filé le plan de GZ en Tchéquie, et comme à ce moment je gagnais correctement ma vie, ben je me suis lancé... 
 
Pitshark et New Christs
Depuis combien de temps tu fais ça ? Quelle est l'histoire du label ?

Le premier 7'' est sorti en décembre 2000. Un 7'' des Sewergrooves. Le label est donc né en suivant l'exemple de Ghostrider rds. A cette époque, pas d'internet, alors j'ai écrit à des groupes que j'aimais, et le premier qui a répondu n'était pas un de ceux-là:)
En fait, j'étais (je suis toujours) fan des Hellacopters. Donc, je les ais sollicités. Mais la réponse de Robert (le batteur) fut négative, trop de singles sortis, en cours, en prévision... ils ne m'attendaient pas !! La bonne nouvelle, c'est que Robert jouait aussi avec les Sewergrooves à cette époque, et donc il me proposait un 7''... J'ai un peu honte de l'avouer, mais je ne connaissais pas les Sewergrooves. J'ai vite rattrapé mon retard et ce fut le premier 7'' de Pitshark rds... La référence RIK001 est en référence à ma fille, Erika... il faut donc bien sûr lire les références lettre après lettre :)

Ce n'est pas un emploi à temps plein, mais je suppose que ça occupe pas mal les week-ends ?

C'est mon hobby ! Alors oui, ça prend du temps, mais comme j'adore ça, je ne m'en rends pas compte.

Si demain j'ai un groupe et que je souhaite sortir un disque sur Pitshark Rds, ça se passe comment ? Quel est le deal ?

C'est pas compliqué, tu me fournis les morceaux mastérisés, ''prêts à l'emploi'', je paie la fabrication, et je te file un pourcentage du pressage. Ça peut varier, mais c'est entre 20 et 25%.

Avec Eddie Spaghetti (Supersuckers)

Il y a des disques en distribution et d'autres que tu fais fabriquer pour Pitshark. Où fais-tu presser ? A part MPO, il y a des usines en France ?

Je crois que j'ai essayé toutes les usines d'Europe :) Bon, peut-être pas toutes, mais pas mal, et il y a les brokers aussi, des intermédiaires qui n'ont pas d'usine, mais des deals avec les usines, et qui arrivent à casser (un peu) les prix... En France, j'ai déjà utilisé MPO, mais je n'ai pas été satisfait... 

Comment trouves-tu les groupes que tu as au catalogue ?

Beaucoup me contactent directement et proposent... Et pour d'autres je les contacte moi-même. Il faut juste que j'aime ce qu'ils font, c'est la base :)
La rentabilité possible n'est pas un critère essentiel.

Tu t'organises comment pour la vente? VPC ? Concerts ? Conventions ?

J'ai mon site (http://www.pitshark.com/) , j'ai fait quelques conventions... L'idéal, c'est quand tu tombes sur des groupes qui sont actifs et qui vendent beaucoup par eux-mêmes... Par exemple, Elli de Mon m'a racheté quasiment tout les vinyles qu'elle a sorti sur Pitshark. A un prix d'ami bien sur. Mais comme ça, le stock descend et les disques circulent, c'est le but !!!
Pitshark et Cosmic Psychos

Sans entrer dans des considérations mercantiles, arrive-t-il qu'un de tes disques soit rapidement en rupture ?

C'est arrivé pour les éditions vinyles de deux albums des Cosmic Psychos (Dung Australia et Off Ya Cruet)... ils étaient épuisés en pré-commande !! Sinon, il faut bien se rendre à l'évidence : c'est pas simple de vendre !!!

Je suppose que ce sont toujours des éditions limitées. Tu les sors à combien d'exemplaires ?

Au début, c'était 500 exemplaires. C'était la belle époque, mais après, ça dépend du groupe, des finances, de mon excitation :) ou même du ''concept''. Par exemple, en 2014, je me suis fait plaisir en lançant le Pitshark Single Club. Douze singles sur douze mois, tirage 100 exemplaires numérotés, uniquement sur abonnement. Une opération pas du tout rentable, épuisante, mais un chouette souvenir, et douze belles galettes, dont des groupes assez connus et d'autres beaucoup moins...

Ton meilleur souvenir avec un groupe ou un disque?

Le meilleur souvenir, il est dans un dépôt de la Poste, en région parisienne... Je venais de recevoir le 7'' des Sewergrooves et je suis allé directement au dépôt pour le récupérer plus vite. J'étais tellement pressé, que j'ai ouvert le colis dans le dépôt, devant un employé de la poste qui se demandait sûrement qui c'était ce barge qui faisait des bonds pour un 45 tours ?? Le premier disque de Pitshark !!!
Avec les groupes, la grande majorité est vraiment cool, je ne les ais pas tous rencontrés, hélas, mais j'ai de bons souvenirs de mes rencontres avec Elli de Mon, Les Cosmic Psychos, Badass Mother Fuzzers, Les Thugs, Jerry Spider Gang, Supersuckers, The Curse, Sewergrooves...
Je me souviens de cette fois en 2004, je suis allé accueillir les Supersuckers à leur arrivée à Roissy, pour leur tournée européenne... J'avais reçu le 12'' de ''Hey Ya !'' l'avant-veille, et les tee-shirt qu'ils m'avaient demandé de faire fabriquer en France (mieux que de les amener avec eux des USA!) la veille. J'avais mon exemplaire, le numéro 001 du maxi, pour me le faire dédicacer... Sauf que Eddie Spaghetti, voyant le numéro, m'a dit un truc du genre ''cool, c'est mon exemplaire'' !!! Ce qui explique que mon exemplaire signé (y compris par Chris Neal, le manager de l'époque) ne soit pas numéroté !!!

Et le pire ?

Pas vraiment de pire souvenir... Le misspress du picture disc des Cosmic Psychos était chiant, mais pas si grave... Ah si, je me suis fait enflé par un espagnol, un pseudo broker, à qui j'ai payé la fabrication d'un 7'' que je n'ai jamais eu :/
Le genre de truc que je préfère oublier...

Chris Masuak
 
Que faisais-tu auparavant ? Tu avais un autre label ? Un groupe ?

Un groupe, mais mieux vaut ne pas en parler :D

Tu as fait un fanzine consacré au Rock Australien. Comment c'est arrivé ? Peux-tu nous raconter comment tu as démarré et combien de temps cela a duré ?

Mon ''histoire'' avec le rock Australien a commencé via mon ami Jean-Jacques (Bam Balam) que je connais depuis mes 15 ans. Un jour, il m'a mis le ''Radios Appear'' de Radio Birdman dans les mains, en disant ''écoute ça, ça devrait te plaire''. A cette époque, j'étais plutôt hard-rock... Je n'ai gardé que Motörhead, et deux-trois autres, mais j'ai radicalement changé d'orientation musicale ! A l'époque, tout se faisait par courrier, pour chopper des disques de là-bas, c'était compliqué. Bordeaux, c'était pas Paris... J'étais en contact avec le gars qui faisait DNA, un fanzine Australien... Et quand j'ai décidé de faire Australian Rock, j'ai largement puisé dedans... C'était du do it yourself complet, textes tapés à la machine, lettraset, maquette avec colle et ciseaux, photocopieuse au coin de la rue, et puis agrafage un par un, pliage, et même massicotage pour certains numéros... Ça a duré de juin 1986 à janvier 1988... 8 numéros en tout... Tirage environ 200 exemplaires, et 40 abonnés !!! Il y a eu aussi un ''hors série'' dédié au rock français : French Beat, à l'initiative de Jean-Jacques (Bam Balam, encore lui!!)
Après ça, j'ai fait Werewolves, mini fanzine gratuit, 7 numéros et puis basta...

Des conseils pour quelqu'un qui fait un fanzine aujourd'hui ?

Aujourd'hui, c'est vraiment plus comme il y a presque 40 ans... Exit le fanzine papier et welcome le blog... Mon seul conseil c'est de se faire plaisir...

Chez Bam Balam à Bordeaux

La musique, tu es tombé dedans quand tu étais petit ? Comment en es-tu arrivé au Rock, au Punk, etc ?

Trajectoire très classique... Les trois ou quatre disques de mon grand frère, écoutés en cachette (Stones, Who, Klaus Schulze!!!!), puis au lycée, les disques des copains (Deep Purple, AC/DC, Iron Maiden, Motörhead... La découverte d'une boutique de disques et bouquins d'occases, où je dépensais tout mon argent de poche... Et puis LA rencontre : Jean-Jacques et sa boutique Bam Balam, où je passais tout mon temps libre... Là j'ai écouté beaucoup de choses, même si j'avais une tendance assez prononcée au sectarisme musical... JJ m'a permis d'ouvrir un peu mes oreilles... Le rock garage ayant eu son âge d'or début 80, je nageais en plein dedans ! Tout en gardant Motörhead dans mon cœur... Un disque qui m'a marqué aussi, comme beaucoup je pense, c'est le Never Mind The Bollocks des Sex Pistols. Mais ça, je ne l'ai réalisé que bien plus tard, lorsque tu ré-écoute un disque qui est resté très longtemps dans sa pochette, et que tu en connais chaque note, c'est quand même un signe :)
J'ai eu la chance à cette époque, de pouvoir aller faire deux séjours à Londres (vers 16 et 17 ans) et des razzia dans les Records and Tapes Exchanges, et dans une moindre mesure chez Vinyl Solution (pour causes de tarifs vraiment plus intéressants chez les premiers :)
Le Portobello market et ses bootlegs par milliers reste un grand souvenir également !

Tu collectionnes ? Disques ? Objets dérivés? Tout ce qui est en rapport avec un groupe ?

Ben oui, je collectionne... Hélas !!! Je dis toujours que c'est une maladie, et je le pense vraiment... Donc oui, les disques, et quasiment pas les objets dérivés. J'ai eu l'occasion de râler sur les godemichets Motörhead, dans une petite interview il y a quelques années dans Rock'n'Folk (hello Isabelle et Silvère:) ) .. Après, il faut bien que les groupes vivent, mais le merchandising, pour moi, c'est le classique, tee-shirt, poster, et versions alternatives de disques...

Quels groupes collectionnes-tu ?

Motörhead, ramones, Pistols, Stooges, The Hip Priests, Scumbag Millionaire, Gun Club, Cosmic Psychos, Turbonegro, Les Thugs, Radio Birdman, New Christs, et plein d'autres... A des niveaux différents, bien sur... Et j'essaie d'avoir tous les disques des groupes sortis sur Pitshark... C'est le minimum... Un vrai malade !!!
Supersuckers

Un message pour ceux qui ne te connaissent pas encore?

Achetez les disques des petits labels. Achetez les aux concerts, ou directement aux labels. Parce que la principale difficulté d'un label, c'est d'être distribué, pour atteindre les gens qui pourraient aimer ces disques... Un petit label, c'est pas un truc pour gagner de l'argent. Vraiment pas... c'est un truc pour en perdre !! Et se faire plaisir...


Merci pour le temps que tu nous a accordés.

You're welcome :)



(Merci d'avance pour vos commentaires !)

Commentaires