ZINE O'RAMA - ROCK HARDI - Fabrice Ribaire en interview
Il était impossible de ne pas parler un jour dans la rubrique Zine O'Rama du fanzine dont la longévité exemplaire reste inégalable en France. Nous avons donc questionné son créateur Fabrice Ribaire qui a de son côté publié un interview des Monstres Sacrés dans le nouveau numéro de Rock Hardi.
En 1982, commence l’histoire de Rock Hardi. Avais-tu déjà eu une expérience préalable dans le monde du fanzinat ?
Non, je n’avais eu aucune expérience préalable dans le monde du fanzinat tout simplement parce qu’à la fin des années 70 et au tout début des années 80, le « monde du fanzinat » était encore très marginal, souterrain et indéfini. D’ailleurs à l’époque on disait plutôt « la presse parallèle » ou « la petite presse underground ». Je crois me souvenir qu’il existait très peu de fanzines sur le rock, il y avait New Wave à Paris, plutôt punk et DIY… et pas mal de fanzines de bandes dessinées, des graphzines... on en entendait parler dans la rubrique « A toute berzingue » de Métal Hurlant mais on ne les connaissait pas vraiment.
Qu’est-ce qui t’a motivé à la création du fanzine ? Quelles ont été tes inspirations ?
Pour ce qui est de la musique, en gros, l’axe Ramones, Cramps, Gun Club… avec Devo, Fleshtones, Blondie, B-52’s, etc. Et pour les français, Starshooter, Bijou, Extraballe, Dogs… La liste serait trop longue, le punk et toute l’agitation musicale de la seconde moitié des 70’s et du début des 80’s.
En ce qui concerne la bande dessinée, j’en lisais depuis tout gamin : Blek Le Roc, Capt’ain Swing, Pif Gadget, Pilote, le journal Tintin, Spirou… et plus tard, il y a surtout eu Métal Hurlant.
Pourquoi l’as-tu nommé Rock Hardi ?
Le nom renvoie à un journal de bandes dessinées qui s’appelait « Coq Hardi ». Il avait été lancé à la libération à Clermont-Ferrand par Marijac, un dessinateur et résistant. Marijac a été après-guerre un pionnier de la bande dessinée moderne, son journal Coq Hardi était un concurrent de Vaillant (futur « Vaillant le Journal de Pif », puis « Pif Gadget »), du journal de Mickey, du journal Tintin… Rock Hardi fait référence à la bande dessinée, à Marijac, à la résistance.
Peux-tu nous expliquer le concept initial du fanzine ? A-t-il changé à travers les années ?
Le concept initial était de mêler rock et bande dessinée. A l’origine c’était d’ailleurs une « petite BD » bricolée mettant en scène les Ramones et les Cramps mais comme on ne trouvait personne pour la publier, on en a fait un fanzine ou, comme on disait à l’époque, « un petit journal amateur ». La maquette du premier numéro faisait d’ailleurs référence à Coq Hardi et au journal Spirou des 50’s. Il a bien entendu évolué à travers les années, pour ne pas dire les décennies, dans la forme comme dans le fond : plus de bande dessinée et moins de rock, ou l’inverse. C’est un prozine depuis quelques années déjà.
Non, je n’avais eu aucune expérience préalable dans le monde du fanzinat tout simplement parce qu’à la fin des années 70 et au tout début des années 80, le « monde du fanzinat » était encore très marginal, souterrain et indéfini. D’ailleurs à l’époque on disait plutôt « la presse parallèle » ou « la petite presse underground ». Je crois me souvenir qu’il existait très peu de fanzines sur le rock, il y avait New Wave à Paris, plutôt punk et DIY… et pas mal de fanzines de bandes dessinées, des graphzines... on en entendait parler dans la rubrique « A toute berzingue » de Métal Hurlant mais on ne les connaissait pas vraiment.
Qu’est-ce qui t’a motivé à la création du fanzine ? Quelles ont été tes inspirations ?
Pour ce qui est de la musique, en gros, l’axe Ramones, Cramps, Gun Club… avec Devo, Fleshtones, Blondie, B-52’s, etc. Et pour les français, Starshooter, Bijou, Extraballe, Dogs… La liste serait trop longue, le punk et toute l’agitation musicale de la seconde moitié des 70’s et du début des 80’s.
En ce qui concerne la bande dessinée, j’en lisais depuis tout gamin : Blek Le Roc, Capt’ain Swing, Pif Gadget, Pilote, le journal Tintin, Spirou… et plus tard, il y a surtout eu Métal Hurlant.
Rock Hardi numéro 1 - 1982 |
Pourquoi l’as-tu nommé Rock Hardi ?
Le nom renvoie à un journal de bandes dessinées qui s’appelait « Coq Hardi ». Il avait été lancé à la libération à Clermont-Ferrand par Marijac, un dessinateur et résistant. Marijac a été après-guerre un pionnier de la bande dessinée moderne, son journal Coq Hardi était un concurrent de Vaillant (futur « Vaillant le Journal de Pif », puis « Pif Gadget »), du journal de Mickey, du journal Tintin… Rock Hardi fait référence à la bande dessinée, à Marijac, à la résistance.
Peux-tu nous expliquer le concept initial du fanzine ? A-t-il changé à travers les années ?
Le concept initial était de mêler rock et bande dessinée. A l’origine c’était d’ailleurs une « petite BD » bricolée mettant en scène les Ramones et les Cramps mais comme on ne trouvait personne pour la publier, on en a fait un fanzine ou, comme on disait à l’époque, « un petit journal amateur ». La maquette du premier numéro faisait d’ailleurs référence à Coq Hardi et au journal Spirou des 50’s. Il a bien entendu évolué à travers les années, pour ne pas dire les décennies, dans la forme comme dans le fond : plus de bande dessinée et moins de rock, ou l’inverse. C’est un prozine depuis quelques années déjà.
Cela fait 41 ans que parait le fanzine, il est devenu une vraie institution. Comment as-tu réussi à garder la foi ? Ou bien as-tu changé ta façon de faire avec le temps, est-ce-que ta relation à la musique a évoluée ?
Au début, on a eu la chance de trouver un correspondant sur Paris dès le premier numéro. Ca nous a permis d’être placé dans les deux endroits « stratégiques » de la capitale à l’époque : la boutique New Rose et la librairie Parallèles. New Rose a disparu mais Parallèles existe toujours et continue d’être notre meilleur point de vente. Dans les années 90, c’est la bande dessinée qui a fait avancer Rock Hardi, on en a publié pas mal, notamment avec Le Martien et la mini-collection « Les Fourmis Associées ». Le développement de l’informatique puis de l’internet ont facilité les choses. On a des lecteurs qui continuent de faire l’effort de le commander à chaque parution, de s’abonner, se réabonner, et pas seulement sur notre kiosque en ligne puisque certains se donnent encore la peine de nous écrire par la Poste. Ca soutient. Ma relation à la musique a évidemment évoluée avec le temps. Maintenant je vais plus souvent dans les salles de cinéma que dans les salles de concerts. Par contre, je suis resté fidèle au vinyl et au CD mais ce « retour du vinyl » me gonfle, la dématérialisation de la musique aussi.
Ton fanzine a traversé beaucoup d’années, tu as dû connaitre tous les autres fanzines rock qui ont existé. Comment as-tu vécu peu à peu leur fin ?
Lorsqu’un fanzine disparaissait, souvent un autre arrivait derrière. La fin de Dig It ! a évidemment été plus triste avec le décès de son fondateur Gildas Cosperec. Aujourd’hui on se sent un peu seul, du moins en tant que rock zine au fonctionnement classique : format papier, abonnement.
Est-ce que tu as été influencé par certains d’entre eux, ou as-tu eu envie de l’être ? Pour toi, quel est le fanzine de référence ?
Pas de fanzine de référence. Chaque fanzine doit avoir sa propre identité, sinon ça n’a pas beaucoup d’intérêt. New Wave, Bruit d’Odeur, Tuez Les Tous !, On A Faim, Le Légume Du Jour, Dig It!, Abus Dangereux... étaient différents de Rock Hardi même s’il pouvait arriver que l’on retrouve parfois les mêmes noms aux sommaires.
Je citais Métal Hurlant au début. Plus qu’une influence, cette revue m’a surtout fait prendre conscience de l’existence d’une « sous-culture », une « contre-culture » regroupant la science fiction, la bande dessinée, le rock, le cinéma fantastique, le roman noir… Je parle bien entendu du Métal 70’s/début 80’s.
Est-ce-que le système de sorties du fanzine est maintenant « rodé » ou rencontres-tu des problèmes de bouclage ?
Je sors deux numéros par an, en juin et en décembre.
Combien de personnes participent à la rédaction ?
Rock Hardi s’est resserré autour de cinq correspondants/rédacteurs (Rémi Tourret, Jean-Paul Guéry, Dom Genot, Yannick Cordier, Patrice Léouffre), un dessinateur (Poup) et moi (fondateur, rédac’chef, maquettiste, secrétaire, etc, etc). Il peut arriver qu’il y ait d’autres intervenant(e)s comme par exemple un dessinateur (Jack O. Leroy) ou des photographes (Lucile Le Bechennec , Maxwell).
Choisissent-ils/elles leurs sujets eux/elles-mêmes ?
Les participants font leurs propositions de contributions. Je peux aussi leur proposer certains sujets…
Est-ce-que l’actualité guide les articles de Rock Hardi, ou bien faites-vous des brainstormings pour savoir de quoi vous allez parler la prochaine fois ?
A part le fait de parler de ce que l’on aime, il n’y a pas de règles, ça peut être l’actualité comme une opportunité d’interview qui se présente… Il arrive parfois que l’on ait les mêmes idées de sujets… pas besoin de brainstorming.
Le dessin a son importance dans ton fanzine, comment rencontres-tu les dessinateurs ? Tu as aussi édité des BD. Peux-tu nous en dire plus sur ce sujet ?
La bande dessinée a surtout été très présente dans Rock Hardi dans les années 80 et 90. Dans les années 80 avec des interviews de dessinateurs (Margerin, Chaland, Serge Clerc, Liberatore…) et des BD de jeunes dessinateurs. Dans les années 90, j’ai créé un deuxième titre, Le Martien, qui paraissait en alternance avec Rock Hardi et dans lequel nous avons publié des tas de dessinateurs. Ils nous écrivaient parce qu’ils connaissaient Rock Hardi ou je les rencontrais à l’espace Zines du Festival BD d’Angoulême. Il y avait encore pas mal de graphzines et de fanzines BD à l’époque. Certains dessinateurs comme Nicolas Moog ou Matthias Lehmann ont ensuite fait leur bonhomme de chemin. On a arrêté la parution du Martien en 2003 après 14 numéros. Pour en savoir plus, visite le site gravezone.fr et tape « Rock Hardi » dans leur moteur de recherche.
Ensuite, après le numéro 32 (n° anniversaire des 20 ans : 100 pages et un CD 25 titres « Best Of des bonus »), j’ai recentré Rock Hardi autour du rock, il y avait le Subsonic à Montpellier, Nova Express et le Kaiser Studio de Lucas Trouble à Chalons sur Saône, déjà Lollipop à Marseille ainsi que Lo’Spider et son Jerry Spider Gang à Toulouse et Bart (Pneumonias, Flyin’Over, Frantic-City...) à La Rochelle… du punk et du rock’n’roll !
Quel est l’article /l’interview qui a pour toi été le plus marquant ? Est-ce-que cela a modifié ton approche pour les Rock Hardi suivants ?
Le n°3 a été une étape importante pour Rock Hardi : on avait réussi à avoir à la fois une interview d'Oberkampf, qui était à ce moment-là le meilleur groupe de la scène punk française, et une interview des Editions Magic Strip, la référence en matière de BD franco-belge à l'époque. Punk rock et bande dessinée ! Mais finalement aucune interview n’a été plus marquante qu’une autre. L’important est de parler de ce que l’on aime, avec nos petits moyens. Bien sûr, certains entretiens ou dossiers ont compté plus que d’autres… et l’on réserve encore des surprises aux lecteurs.
Si tu devais résumer l’histoire du fanzine à travers ses meilleurs moments, quels seraient-ils ?
Les premiers numéros, les premiers bonus dans le zine (des flexi-discs : Oth dans le n°17, Les Thugs dans le n°18), la compilation Rock Hardi « Volume 1 » en 1991 avec New Rose, le comix’zine Le Martien, la mini collection de BD « Les Fourmis Associées », le numéro 32 de 100 pages et sa couverture léopard pour les 20 ans, Les compilations bonus « Grand Prix » à partir du n°33, et d’autres que j’oublie...
Tu as proposé des 45t et des CD avec le fanzine, peux-tu nous parler de l’évolution de la forme de Rock Hardi à travers son histoire ? Le format et le type d’impression ont dû évoluer ? Est-ce-que les 45t étaient insérés comme le CD actuellement ?
Pour faire court, il y a quarante ans, le fanzinat c’était encore machine à écrire et photocopies (ou offset pour les plus fortunés). Ensuite, l’impression numérique est arrivée, l’informatique s’est développée, puis l’internet, c’est devenu peu à peu plus pratique et moins coûteux. On est passé à une couverture en quadrichromie à partir du n°23 et on a commencé à utiliser la PAO en 1994 à partir du n°24. Le format « historique » de Rock Hardi est 15 x 21 cm, c’est le même jusqu’à aujourd’hui. On a bien fait quelques tentatives au format A4, mais sans suite. Une petite dizaine de numéros sont sortis au format « comics » 17 x 25 cm, ça permettait d’insérer les flexi-discs et les 45 tours bonus en pages centrales dans une pochette à découper.
Comment se passe la réalisation du CD de A à Z ?
Comme dirait machin, c’est pas sorcier : on essaie dans la mesure du possible d’avoir des morceaux de tous les groupes au sommaire, avec des inédits. Mastering, gravage, insertion du CD… tout est « fait maison », ça permet de réduire les coûts et ainsi de ne pas encombrer les pages du journal de pubs payantes. En général, c’est Poup qui se charge du dessin de la pochette et du rond central. Les lecteurs peuvent découper la pochette en quatrième de couverture… ou acheter deux exemplaires s’ils ne veulent pas abimer leur zine préféré.
Tu précises dans les numéros que tu ne veux recevoir que des objets physiques pour les chroniquer (fanzines, livres, disques) ? Peux-tu nous en donner la raison ?
Tout simplement parce que l’on ne peut pas parler de tout et de tout le monde alors je chronique uniquement les disques que j’aime et que les groupes (ou les labels) se donnent la peine de m’envoyer en « physique ». Ceux qui envoient un lien sans connaitre Rock Hardi en pensant que ce n’est qu’un vulgaire support promotionnel de plus pour eux ne m’intéressent pas. Rock Hardi doit rester une histoire d’échanges et de passion. Et il me semble que le rock’n’roll, c’est avant tout des concerts et des disques. Le punk, c’est le Do It Yourself… alors aux groupes (et labels) de se prendre en main et de faire un effort.
Si Rock Hardi était un bar, quels en seraient les piliers de comptoir, peut-être des copains ?
Un bar ?! Des piliers de comptoir ?!! Je préfèrerais un club rock, carrément ! La programmation serait élaborée à partir des groupes au sommaire. Le public serait les lecteurs de Rock Hardi. Les habitués du lieu seraient les abonnés et les lecteurs qui l’achètent à chaque parution, le personnel les contributeurs de Rock Hardi.
Pourrais-tu t’imaginer que Rock Hardi devienne un webzine à la place du format papier ?
Ce n’est pas à l’ordre du jour.
En Allemagne, l’institution en fanzine rock est Oxx Fanzine. Lindsay Hutton y participe depuis des années. Ils proposent le fanzine version papier et PDF. N’as-tu pas aussi envie de proposer les anciens numéros en PDF ? Il est un peu triste qu’ils soient tombés dans l’oubli. Peut-être un projet de livre tel que celui des recueils d’articles de Nineteen t’intéresserait ?
Effectivement, il y aurait à faire au niveau de Rock Hardi, encore faudrait-il que je trouve le temps et les moyens. C’est déjà exceptionnel que j’ai réussi à maintenir la parution de Rock Hardi jusqu’à aujourd’hui, alors point trop n’en faut. Il y a un projet de versions PDF en ligne de numéros épuisés. Sur gravezone.fr, on peut voir toutes les couvertures de Rock Hardi jusqu’en 2001 et une bonne cinquantaine de couvertures de nos autres publications : Rock Hardi News, Le Martien, Les Fourmis Associées... Et je rappelle que nous avons un kiosque en ligne pour commander les numéros disponibles et s’abonner : www.rockhardi.com. Pour le reste, on verra...
Gildas Cosperec était fier d’être arrivé au numéro 76 de Dig It !. Il trouvait ce chiffre « punk » assez sympa. As-tu toi aussi en tête le nombre de Rock Hardi que tu désires réaliser ?
En plus des 64 numéros de Rock Hardi, il faut ajouter tous les hors-séries, newsletters, BD, etc. On doit en être à 135 parutions. En 1982, je me souviens qu’on étaient fiers d’avoir sorti le n°1, c’était un zine amateur donc un peu maladroit mais on l’avait fait ! Et en 2023, je suis assez fier du n°64, c’est mon préféré… jusqu’au prochain.
Au début, on a eu la chance de trouver un correspondant sur Paris dès le premier numéro. Ca nous a permis d’être placé dans les deux endroits « stratégiques » de la capitale à l’époque : la boutique New Rose et la librairie Parallèles. New Rose a disparu mais Parallèles existe toujours et continue d’être notre meilleur point de vente. Dans les années 90, c’est la bande dessinée qui a fait avancer Rock Hardi, on en a publié pas mal, notamment avec Le Martien et la mini-collection « Les Fourmis Associées ». Le développement de l’informatique puis de l’internet ont facilité les choses. On a des lecteurs qui continuent de faire l’effort de le commander à chaque parution, de s’abonner, se réabonner, et pas seulement sur notre kiosque en ligne puisque certains se donnent encore la peine de nous écrire par la Poste. Ca soutient. Ma relation à la musique a évidemment évoluée avec le temps. Maintenant je vais plus souvent dans les salles de cinéma que dans les salles de concerts. Par contre, je suis resté fidèle au vinyl et au CD mais ce « retour du vinyl » me gonfle, la dématérialisation de la musique aussi.
Ton fanzine a traversé beaucoup d’années, tu as dû connaitre tous les autres fanzines rock qui ont existé. Comment as-tu vécu peu à peu leur fin ?
Lorsqu’un fanzine disparaissait, souvent un autre arrivait derrière. La fin de Dig It ! a évidemment été plus triste avec le décès de son fondateur Gildas Cosperec. Aujourd’hui on se sent un peu seul, du moins en tant que rock zine au fonctionnement classique : format papier, abonnement.
Est-ce que tu as été influencé par certains d’entre eux, ou as-tu eu envie de l’être ? Pour toi, quel est le fanzine de référence ?
Pas de fanzine de référence. Chaque fanzine doit avoir sa propre identité, sinon ça n’a pas beaucoup d’intérêt. New Wave, Bruit d’Odeur, Tuez Les Tous !, On A Faim, Le Légume Du Jour, Dig It!, Abus Dangereux... étaient différents de Rock Hardi même s’il pouvait arriver que l’on retrouve parfois les mêmes noms aux sommaires.
Je citais Métal Hurlant au début. Plus qu’une influence, cette revue m’a surtout fait prendre conscience de l’existence d’une « sous-culture », une « contre-culture » regroupant la science fiction, la bande dessinée, le rock, le cinéma fantastique, le roman noir… Je parle bien entendu du Métal 70’s/début 80’s.
Est-ce-que le système de sorties du fanzine est maintenant « rodé » ou rencontres-tu des problèmes de bouclage ?
Je sors deux numéros par an, en juin et en décembre.
Combien de personnes participent à la rédaction ?
Rock Hardi s’est resserré autour de cinq correspondants/rédacteurs (Rémi Tourret, Jean-Paul Guéry, Dom Genot, Yannick Cordier, Patrice Léouffre), un dessinateur (Poup) et moi (fondateur, rédac’chef, maquettiste, secrétaire, etc, etc). Il peut arriver qu’il y ait d’autres intervenant(e)s comme par exemple un dessinateur (Jack O. Leroy) ou des photographes (Lucile Le Bechennec , Maxwell).
dessin de Walter Minus |
Les participants font leurs propositions de contributions. Je peux aussi leur proposer certains sujets…
Est-ce-que l’actualité guide les articles de Rock Hardi, ou bien faites-vous des brainstormings pour savoir de quoi vous allez parler la prochaine fois ?
A part le fait de parler de ce que l’on aime, il n’y a pas de règles, ça peut être l’actualité comme une opportunité d’interview qui se présente… Il arrive parfois que l’on ait les mêmes idées de sujets… pas besoin de brainstorming.
Le dessin a son importance dans ton fanzine, comment rencontres-tu les dessinateurs ? Tu as aussi édité des BD. Peux-tu nous en dire plus sur ce sujet ?
La bande dessinée a surtout été très présente dans Rock Hardi dans les années 80 et 90. Dans les années 80 avec des interviews de dessinateurs (Margerin, Chaland, Serge Clerc, Liberatore…) et des BD de jeunes dessinateurs. Dans les années 90, j’ai créé un deuxième titre, Le Martien, qui paraissait en alternance avec Rock Hardi et dans lequel nous avons publié des tas de dessinateurs. Ils nous écrivaient parce qu’ils connaissaient Rock Hardi ou je les rencontrais à l’espace Zines du Festival BD d’Angoulême. Il y avait encore pas mal de graphzines et de fanzines BD à l’époque. Certains dessinateurs comme Nicolas Moog ou Matthias Lehmann ont ensuite fait leur bonhomme de chemin. On a arrêté la parution du Martien en 2003 après 14 numéros. Pour en savoir plus, visite le site gravezone.fr et tape « Rock Hardi » dans leur moteur de recherche.
Ensuite, après le numéro 32 (n° anniversaire des 20 ans : 100 pages et un CD 25 titres « Best Of des bonus »), j’ai recentré Rock Hardi autour du rock, il y avait le Subsonic à Montpellier, Nova Express et le Kaiser Studio de Lucas Trouble à Chalons sur Saône, déjà Lollipop à Marseille ainsi que Lo’Spider et son Jerry Spider Gang à Toulouse et Bart (Pneumonias, Flyin’Over, Frantic-City...) à La Rochelle… du punk et du rock’n’roll !
Quel est l’article /l’interview qui a pour toi été le plus marquant ? Est-ce-que cela a modifié ton approche pour les Rock Hardi suivants ?
Le n°3 a été une étape importante pour Rock Hardi : on avait réussi à avoir à la fois une interview d'Oberkampf, qui était à ce moment-là le meilleur groupe de la scène punk française, et une interview des Editions Magic Strip, la référence en matière de BD franco-belge à l'époque. Punk rock et bande dessinée ! Mais finalement aucune interview n’a été plus marquante qu’une autre. L’important est de parler de ce que l’on aime, avec nos petits moyens. Bien sûr, certains entretiens ou dossiers ont compté plus que d’autres… et l’on réserve encore des surprises aux lecteurs.
Si tu devais résumer l’histoire du fanzine à travers ses meilleurs moments, quels seraient-ils ?
Les premiers numéros, les premiers bonus dans le zine (des flexi-discs : Oth dans le n°17, Les Thugs dans le n°18), la compilation Rock Hardi « Volume 1 » en 1991 avec New Rose, le comix’zine Le Martien, la mini collection de BD « Les Fourmis Associées », le numéro 32 de 100 pages et sa couverture léopard pour les 20 ans, Les compilations bonus « Grand Prix » à partir du n°33, et d’autres que j’oublie...
Tu as proposé des 45t et des CD avec le fanzine, peux-tu nous parler de l’évolution de la forme de Rock Hardi à travers son histoire ? Le format et le type d’impression ont dû évoluer ? Est-ce-que les 45t étaient insérés comme le CD actuellement ?
Pour faire court, il y a quarante ans, le fanzinat c’était encore machine à écrire et photocopies (ou offset pour les plus fortunés). Ensuite, l’impression numérique est arrivée, l’informatique s’est développée, puis l’internet, c’est devenu peu à peu plus pratique et moins coûteux. On est passé à une couverture en quadrichromie à partir du n°23 et on a commencé à utiliser la PAO en 1994 à partir du n°24. Le format « historique » de Rock Hardi est 15 x 21 cm, c’est le même jusqu’à aujourd’hui. On a bien fait quelques tentatives au format A4, mais sans suite. Une petite dizaine de numéros sont sortis au format « comics » 17 x 25 cm, ça permettait d’insérer les flexi-discs et les 45 tours bonus en pages centrales dans une pochette à découper.
Comment se passe la réalisation du CD de A à Z ?
Comme dirait machin, c’est pas sorcier : on essaie dans la mesure du possible d’avoir des morceaux de tous les groupes au sommaire, avec des inédits. Mastering, gravage, insertion du CD… tout est « fait maison », ça permet de réduire les coûts et ainsi de ne pas encombrer les pages du journal de pubs payantes. En général, c’est Poup qui se charge du dessin de la pochette et du rond central. Les lecteurs peuvent découper la pochette en quatrième de couverture… ou acheter deux exemplaires s’ils ne veulent pas abimer leur zine préféré.
Tu précises dans les numéros que tu ne veux recevoir que des objets physiques pour les chroniquer (fanzines, livres, disques) ? Peux-tu nous en donner la raison ?
Tout simplement parce que l’on ne peut pas parler de tout et de tout le monde alors je chronique uniquement les disques que j’aime et que les groupes (ou les labels) se donnent la peine de m’envoyer en « physique ». Ceux qui envoient un lien sans connaitre Rock Hardi en pensant que ce n’est qu’un vulgaire support promotionnel de plus pour eux ne m’intéressent pas. Rock Hardi doit rester une histoire d’échanges et de passion. Et il me semble que le rock’n’roll, c’est avant tout des concerts et des disques. Le punk, c’est le Do It Yourself… alors aux groupes (et labels) de se prendre en main et de faire un effort.
Si Rock Hardi était un bar, quels en seraient les piliers de comptoir, peut-être des copains ?
Un bar ?! Des piliers de comptoir ?!! Je préfèrerais un club rock, carrément ! La programmation serait élaborée à partir des groupes au sommaire. Le public serait les lecteurs de Rock Hardi. Les habitués du lieu seraient les abonnés et les lecteurs qui l’achètent à chaque parution, le personnel les contributeurs de Rock Hardi.
Pourrais-tu t’imaginer que Rock Hardi devienne un webzine à la place du format papier ?
Ce n’est pas à l’ordre du jour.
En Allemagne, l’institution en fanzine rock est Oxx Fanzine. Lindsay Hutton y participe depuis des années. Ils proposent le fanzine version papier et PDF. N’as-tu pas aussi envie de proposer les anciens numéros en PDF ? Il est un peu triste qu’ils soient tombés dans l’oubli. Peut-être un projet de livre tel que celui des recueils d’articles de Nineteen t’intéresserait ?
Effectivement, il y aurait à faire au niveau de Rock Hardi, encore faudrait-il que je trouve le temps et les moyens. C’est déjà exceptionnel que j’ai réussi à maintenir la parution de Rock Hardi jusqu’à aujourd’hui, alors point trop n’en faut. Il y a un projet de versions PDF en ligne de numéros épuisés. Sur gravezone.fr, on peut voir toutes les couvertures de Rock Hardi jusqu’en 2001 et une bonne cinquantaine de couvertures de nos autres publications : Rock Hardi News, Le Martien, Les Fourmis Associées... Et je rappelle que nous avons un kiosque en ligne pour commander les numéros disponibles et s’abonner : www.rockhardi.com. Pour le reste, on verra...
Gildas Cosperec était fier d’être arrivé au numéro 76 de Dig It !. Il trouvait ce chiffre « punk » assez sympa. As-tu toi aussi en tête le nombre de Rock Hardi que tu désires réaliser ?
En plus des 64 numéros de Rock Hardi, il faut ajouter tous les hors-séries, newsletters, BD, etc. On doit en être à 135 parutions. En 1982, je me souviens qu’on étaient fiers d’avoir sorti le n°1, c’était un zine amateur donc un peu maladroit mais on l’avait fait ! Et en 2023, je suis assez fier du n°64, c’est mon préféré… jusqu’au prochain.
Merci Fabrice
(interview de novembre 2023)
Commentaires