THEME SONGS – part 1 – La Peine de mort

 



Nouvelle rubrique à thème, avec un sujet pas très réjouissant pour une fois, désolé, qui a inspiré pas mal de songwriters, la peine de mort, la peine capitale – je ne parle pas de Michel Sardou ou du désarroi des parisiens pendant les JO, mais de chansons contre la peine de mort. Aux USA, près des deux tiers des exécutés sont de couleur noire.

Celle que je préfère est celle chantée par Lee Hazlewood, accompagné par Duane Eddy, The Girl On Death Row, sortie initialement en 1960, qui raconte l’histoire d’une fille, dont on ignore de quel crime on l’accuse et qui, malgré le fait d’avoir tout le temps clamé son innocence, finit par être exécutée. Terminés ses projets de fonder une famille avec son amoureux. Puis un jour, on a attrapé le responsable (la chanson ne dit pas de quoi), la justice était désolée, mail il était trop tard pour la fille du couloir de la mort…

Cette histoire d’injustice me rappelle le début du livre Life Is So Good de Charles Dawson (1889-2001), un homme noir qui a appris à lire et à écrire sur le tard, publiant son autobiographie, sans ressentiment, à l’âge de 99 ans. Au début de son livre, Il raconte l’histoire d’une jeune black de 15 ans, accusé par une fille blanche de l’avoir mise enceinte après l‘avoir violée. Justice expéditive dans le Mississippi, on lui met la corde au cou. Pas une seconde il n’a quitté ses bourreaux des yeux, ni n’a tremblé. Personne ne s’est posé la question quelques mois plus tard que le bébé soit bien blanc. Il était trop tard aussi pour x (il me semble que George Dawson cite son nom, je n’ai plus le bouquin pour vérifier, me l’étant fait voler – prêté non rendu – par un couple de blaireaux évreutins).

Il existe de nombreuses chansons qui traitent plus ou moins directement de la peine de mort, je me limiterai à citer celles que j’aime bien musicalement. Pas de Mersey Seat par Nick Cave (chanson co-écrite par Mick Harvey), qui se compare à Jésus, donc, me voilà débarrassé.

La première chanson à parler de la peine capitale, en tout cas par chaise électrique, est probablement Electric Chair Blues de Blind Lemon Jefferson, 1928, dans laquelle il se demande pourquoi ils électrocutent un homme à cette heure de la nuit. Et bien, c’est parce que le courant est bien plus fort quand les gens ont éteint toutes les lumières.

Toujours la chaise électrique avec Ellis Unit One de Steve Earle (1997), l’histoire d’un mec qui n’a rien trouvé de mieux que de bosser dans une prison pour pouvoir fonder une famille, comme son père et deux de ses oncles avant lui. Tout se passait bien jusqu’à ce qu’il soit muté à la prison Ellis Unit, au Texas. Tous ces gens qui se réjouissent d’assister à une exécution, la famille qui se tient par la main dans un coin, en silence. Il en resta traumatisé à vie.

La première chanson à évoquer la pendaison, et du manque d’argent pour pouvoir y échapper, est Gallis Pole, de Leadbelly, en 1939. Même thème abordé par la chanteuse gospel / country / folk Odetta en 1960, avec la chanson presque homonyme, Gallows Pole.

Parmi mes artistes préférés et un peu comme l’injustice décrite par Lee Hazlewood et le manque d’argent évoqué par Leadbelly, il y a Phil Ochs et sa chanson Iron Lady (la dame de fer, la chaise électrique), 1965 : les meilleurs avocats sont payés et un homme riche n’est jamais mort sur la chaise. Le meurtre est tellement mal, tu vois, la bible et les tribunaux sont d’accord... dit notamment la chanson. Au passage, je recommande vivement l’album Greatest Hits (ahah) de Phil Ochs (1970), sous-titré 50 Phil Ochs Fans Can’t Be Wrong! (re ahah), all killers no fillers.

 


La même année, avec une pointe d’humour (l’homme en) noir, Johnny Cash, raconte l’histoire d’un gars à qui il reste 25 minutes à vivre – 25 Minutes To Go (1965, donc), au moment où il voit ses bourreaux monter la potence, puis 24, 23…, 20 minutes, il espère voir le gouverneur ou le maire débouler mais ils sont en train de déjeuner. Il lui reste 18 minutes au moment où il crache à la gueule du shérif venu lui dire qu’il viendrait le regarder mourir.

John Cooper Clarke, craint, dans Suspended Sentence, chanson extraite de son premier single Innocence, que la peine de mort abolie en 1969 en Angleterre, soit réhabilitée par la populace, prête à te prendre aux feux de signalisation pour raison d’incontinence ou parce que tu as truandé les impôts.

Fairport Convention, dans Poor Willy & The Jolly Hangman (1982), essaye de rassurer un peu (!) le pauvre Willy en lui disant que le Jolly Hangman le pendra du mieux qu’il peut.

Certaines chansons dénoncent l’injustice subie par des personnages bien précis, comme Calexico avec Victor Jara’s Hands (2008), un chanteur, songwriter et activiste politique Chilien, torturé puis abattu par les soldats de Pinochet, qui après lui avoir coupé les doigts et écrasé les mains, lui lancèrent une guitare en lui disant d’en jouer.

D’autres artistes prennent parti pour des condamnés à mort, dont certains y échapperont, comme Rubin Hurricane Carter, un boxeur noir accusé à tort de trois meurtres – le coupable blanc n’ayant qu’à dire ce n’est pas moi, je venais juste pour piquer la caisse. Il s’agit bien sûr de la chanson Hurricane de Bob Dylan (1976).

Est-ce que Jonathan Richman, avec sa chanson Abu Jamal (2004) contribuera à faire sortir du couloir de la mort puis de prison Mumia Abu-Jamal, un journaliste, écrivain et militant, encore un homme noir, emprisonné depuis 1981 et attendant dans le couloir de la mort depuis 1982 pour le meurtre d’un policier, vite contesté par des manifestations un peu partout dans le monde.

En revanche, le jeune anglais de 19 ans, Derek Bentley, a lui bel et bien été pendu, alors que c’est son complice qui avait tué un policier. Une des plus grandes erreurs judiciaires anglaise, évoquée par Elvis Costello dans Let Him Dangle (1989).

Un peu comme Lee Hazlewood dans The Girl On Death Row, Judy Collins raconte dans Tim Evans (1961), l’histoire de ce gars qui a été pendu pour avoir tué sa femme et son fils, alors que c’est un certain Christie qui avait fait le coup. La justice a dû encore une fois être désolée de son erreur, après coup.


Patrick Bainée


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