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CHRISTOPHE LOPEZ-HUICI - DIG IT!... BANANAS MAGAZINE - MAIS PAS SEULEMENT !




Nous avons découvert le travail de CHRISTOPHE LOPEZ-HUICI grâce à ses illustrations pour The Routes et les fanzines Bananas et Dig It! et avions envie d'en apprendre plus !


Peux-tu nous dire comment tu as commencé à dessiner et quels artistes t'ont influencé ?

J’ai toujours dessiné. Étant petit la première chose que je faisais en me levant était de dessiner. Il y a bien évidemment des tonnes d’illustrateurs qui m’ont influencé (et qui continuent) que ce soit au niveau de leur style ou de leurs idées. Au niveau du style j’aime autant les auteurs de ligne claire comme Hergé que les illustrateurs avec un style plus spontané, voir les artistes expressionnistes des années 20. Sinon j’adore bien évidement les cartoonists américains alternatifs des années 60-70 genre Crumb, souvent plus pour les thèmes traités que pour leur dessin. Mais mon illustrateur favoris, que je considère comme l’un des plus grands artistes du XXème siècle c’est Moebius.


Tu as étudié le dessin dans de grandes écoles, mais qu'as-tu été obligé d'étudier en autodidacte ?


Principalement l’animation que je n’avais pas étudié à l’école. Mais j’ai toujours été un fan d’animation et avec l’aide de quelques bouquins comme "Ces Dessins Qui Bougent" de René Laloux (réalisateur de La Planète Sauvage) et en regardant pas mal de making-of de films animés j’ai appris ce dont j’avais besoin pour faire mes premiers pas en animation. Avec des vagues notions de ‘stop-motion’ j’ai bricolé une vidéo pour la chanson Bones By My Bedside des Hexxers (qui doit toujours être sur Youtube). À partir de là j’ai petit à petit peaufiné ma technique et j’ai fait divers projets d’animation. Quelques pubs, des séquences animées pour un documentaire et aujourd’hui je fais surtout mes propres films.


Quelle a été ta première illustration publiée ?


Dans le domaine de la musique, la première illustration publiée fut la couverture de l’album des Routes, un groupe garage japonais. Dans d’autres domaine, rien de notable, des dessins commissionnés qui d’un point de vue artistique ou personnel n’avait pas grand interêt.

Tu as aussi fait de l'animation (dessin + image par image), quelles sont là aussi tes influences ?


Oui d’ailleurs ces jours-çi je fais plus d’animation que d’illustration. Mon deuxième court-métrage est en ce moment sur le circuit des festivals, et je travaille sur le script de mon prochain film. Mes influences sont principalement les animateurs classiques qui travaillent en 2d mais si je ne devais en nommer que deux ce seraient Sylvain Chomet dont j’adore l’esthétique et Ralph Bakshi qui a réalisé Heavy Traffic et Fritz, deux de mes films d’animation favoris.

Tu es aussi intéressé par la musique "underground", raconte-nous un peu ce côté de ta personnalité.

Depuis que j’ai découvert les groupes garage des 60s j’ai été fasciné par le mouvement que ce soit au niveau musical ou visuel. Et cela m’a amené à découvrir la scène garage/punk/psych actuelle. Pendant longtemps je ne faisait que parti du public. J’allais probablement à 2-3 concerts par semaines. N’ayant aucun talent pour la musique (même pas le talent nécessaire pour jouer 3 cordes à la guitare haha) j’ai du me resigner à participer autrement. De là m’est venu l’idée de créer Bananas Magazine, afin de soutenir et de parler les groupes modernes que j’aimai.

Tu as créé pas mal de couvertures de disques, telles que celles des
Routes ou des Smoggers. peux-tu nous expliquer ta façon de travailler et quels outils tu utilises pour tes illustrations ?


Les premières couvertures étaient dessinées et coloriées à la main à l’encre de chine et aquarelles. Mais petit à petit j’ai commencé à utiliser des techniques digitales pour la couleur, ce qui facilite les choses si le client veut des changements. Évidement le rendu est un peu different, moins organique. Je préfère tout faire à la main et pour mes projets personnels je favorise toujours les techniques traditionnelles. Pour l’inspiration, j’écoute le disque et j’essaye de représenter ce qu’il évoque pour moi.

Es-tu plus papier et crayon ou ordinateur ?

Comme je viens de le dire, plutôt papier et crayon mais j’ai de plus en plus souvent recours à des techniques digitales qui facilitent pas mal la tâche.

Nous avons déjà interviewé quelques artistes tel que William Stout, ils ont tous été influencés par les E.C. Comics. Tes dessins nous font beaucoup plus penser à ceux des Simpsons. Penses-tu que cela vient de la différence de génération, ou crois-tu qu'au niveau dessin rock, il existe une base commune inaltérable (Robert Crumb / Freak Brothers etc...) ?

Je pense en effet que certains artistes ont établi les fondations de ce qu’allait être le dessin rock pour les décennies à venir. Maintenant que j’y repense, un autre illustrateur qui m’a beaucoup influencé est Joe Sacco et son roman graphique "But I Like It" ou il chronique en dessin la tournée Européenne des Miracle Workers, groupe garage légendaire des ’80s. Mais son style était clairement inspiré par Crumb, même si il y a apporté son propre style. Et E.C. Comics a probablement été l’influence majeure pour les couvertures des compilations Back From the Grave qui a leur tour ont été la principale inspiration pour une nouvelle générations d’illustrateurs dédiés à la scène garage.
Je ne pense pas que la différence de mon style soit lié a une différence de génération car dans cette scène comme vous le savez bien nous cherchons tous nos inspirations dans le passé. Simplement j’aime cultiver mon propre style, même si il ne colle pas exactement à l’esthétique ‘garage’.

Peux-tu nous donner un exemple d'une de tes illustrations "rock", et nous expliquer son évolution ?

Voici la couverture pour une compilation de groupe garage japonais que j'ai fait pour le label portugais Groovie Records. J’envoie toujours un premier croquis au client. Il m’envoie son retour, je retravaille le croquis et on fait des allez-retour comme ça jusqu’a ce qu’il soit content. Une fois qu’on est d’accord sur la composition alors j’encre le tout. Puis je colore, soit manuellement soit digitalement. Dans ce cas, évidement il n'y avait pas un max de coloriage et je l'ai fait digitalement.



Es-tu en contact avec des artistes actuels, pourrais-tu nous en conseiller ?

Non pas vraiment, mais j’ai interviewé pas mal d’illustrateurs que j'adore pour Bananas. Elzo Durt, Lluis Fuzzhound, Olaf Jens, Mik Baro, Shawn Dickinson...

Quelle est l'illustration que tu as faite dont tu es le plus fier ? 

Le plus fier pour quelle raison? Parce que c’est pour un artiste que j’aime vraiment, ou parce que le disque est vraiment bon ou simplement parce que je trouve que j’ai fait un bon boulot? Je suis toujours assez critique de mon propre travail et à partir du moment ou une illustration est publiée, je la vois généralement d’un oeil beaucoup plus sévère. Disons que je suis fier d’avoir pu illustrer les Mummies, les Flamin’ Groovies et Dead Moon pour des magazines.





Quelle est celle qui t'a amené le plus de reconnaissance ?

Je ne sais pas si j’ai déjà fait une illustration qui m’a amené la reconnaissance. Je dirai que mon heure de gloire fut lorsque je créa une illustration pour le lancement de iGoogle en 2005 et que mes illustrations (avec celles d’artistes comme Jeff Koons) furent projetées sur les murs des immeubles du meat-packing district à New York toutes les nuits pendant une semaine.


Tu as été à l'origine du fanzine Bananas, peux-tu nous en parler ?

Bananas Magazine était un ‘zine imprimé que nous avions lancé à NY en 2009 dans le but d’explorer la scène garage, punk, psych actuelle. Le magazine était gratos, distribué à 3000 exemplaires et il suffisait de payer les frais de port pour obtenir une copie. On envoyait aussi des copies aux labels qui plaçaient une pub dans le ‘zine et eux mettaient des copies dans leurs commandes. Le magazine n’existe malheureusement plus mais le site, si (www.bananas-magazine.com) et les 18 numéros sont disponibles en version digitale sur issuu. Les compilations que l’on a sorti sont elles aussi toujours téléchargeables gratuitement sur bandcamp: www.bananasmagazine.bandcamp.com





Pourquoi n'existe-t-il plus ?


En 2019, mon second enfant est né et le temps libre dédié à mes hobbies en fut sévèrement réduit haha. J’avais quelques collaborateurs pour Bananas mais c’est moi qui me chargeait de quasiment tout et c’est vrai que ça représentait trop de boulot. Puis le covid est arrivé, aller à la poste devint quasiment impossible alors j’ai mis Bananas en pause indéfinie. J’ai toujours l’espoir de relancer le magazine un de ces jours.

Comment as-tu été amené à dessiner les couvertures des fanzines Dig It! ? Peux-tu nous en raconter tes souvenirs et comment tu les as connus ?

Dig It! avait contacté Bananas en 2011 pour nous interviewer. Après ça je suis resté en contact avec Gildas puis ou jour je lui ai proposé de faire une couverture pour Dig It! Il m’a donné le feu vert et ce fut la première couv’ pour Dig It! Celle avec les Grys-Grys. Puis j’en fis deux autres, une avec les Real Kids (mon rêve considérant que les Real Kids sont probablement mon groupe favoris) et celle avec les Lullies.



As-tu peut-être les brouillons des couvertures ou des versions alternatives que tu pourrais faire découvrir aux lecteurs ?

En voici quelques-un. Un des avantages de ne pas travailler uniquement digitalement. Ça laisse des traces!



Tu dessines aussi beaucoup pour les enfants, c'est très différent du dessin rock. Peux-tu nous raconter ce qui t'y amener et quel est la différence entre les deux ?

J’ai toujours aimé les illustrations pour enfants. William Steig, Roald Dahl, Sempé sont des illustrateur que j’admire énormément. Et bien que j’adore la musique, je suis d’abord un illustrateur et je n’aime pas me cantonner à une seul genre. J’aime explorer mes possibilités, m’amuser en dessinant et je trouve l’illustration infantile plus libre que l’illustration pour les groupes (de garage) qui au finale veulent toujours un peu la même chose. J’en avait marre de dessiner des bottes pointues, des guitares Vox et des t-shirts à rayure. De la même manière que je ne comprend pas les groupes qui jouent en gros une variante des mêmes 3 notes durant toute leur carrière (et je ne parle pas des Ramones mais des groupes garage sans imagination) je ne me vois pas dessiner des varientes sur le même thème toute ma vie.

As-tu des groupes qui te seraient à cœur de nous faire connaitre ?

Je crois que je n’ai pas tellement de groupes à vous faire découvrir. Vous connaissez déjà probablement tous mes groupes favoris. En ce qui concerne les nouveaux groupes je n’ai pas eu de gros coup de coeur depuis pas mal de temps. Je ne sais pas si c’est le fait de ne plus recevoir des tonnes de promos pour Bananas ou le fait que je soit récemment devenu plus exigent dans ce que je recherche musicalement.

Collectionnes-tu les disques et quelles sont les pièces que tu es le plus heureux de posséder?

J’ai collectionné, maintenant j’achète surtout en vinyle ce qui n’est pas disponible sous d’autres formats. J’ai environ 1200 vinyls, mais à vrai dire je ne les joue presque jamais. Je les digitalise au fur à mesure que je les achète et je ne joue la musique que de mon ordinateur. Quand je travaille je ne peux pas me permettre de me lever toutes les 20 minutes pour changer de face et comme je ne travaille qu’avec de la musique, contrôler la musique depuis mon ordinateur est essentiel.
À une époque, mes groupes favoris venaient de la scène garage revival des 80s et certains des disques dont je sais que je ne me séparerais jamais sont ceux des Gruesomes, Tell-Tale Hearts, Miracle Workers, Wylde Mammoths. Bon et ceux dont j’ai fait les couvertures haha (même si il y en a plusieurs dont je trouve la musique médiocre).

Toi qui as vécu aux États-Unis, Angleterre, Allemagne, Espagne et France, peux-tu nous donner ta vision de la différence de la scène rock ainsi que celle des dessins entre tous ces pays ? 


C’est surtout le genre de lieu dans lesquels les groupes jouent qui changent beaucoup d’une ville à l’autre. En arrivant à Londres c’était un choc de voir les groupes jouer sur les scènes assez soignées des pubs après avoir passé un an à Berlin ou les lieux de musique se rapprochaient plus de squats que de salles de concert à proprement parler. Et puis il y a aussi la difference d’attitude dans le public. Disons que les espagnoles sont plus enthousiastes que les autres, et que les new yorkais se préoccupent un peu trop de leur apparences, mais au final il y a des concerts géniaux et des concerts pourris partout. Quant à la qualité des groupes locaux j’en ai vu d’excellent dans toutes les villes ou j’ai habité.

Quels sont tes projets actuels ?

Je suis en train de terminer deux livres pour enfants pour un éditeur Chinois.
Et sinon, comme je te l’ai dit je suis en train de développer le script pour mon prochain court-métrage animé. Et je commence à voir bien envie de retravailler avec des groupes, alors si vous lisez cet interview, que vous aimez ce que je fais et que vous avez besoin d'une pochette, n'hésitez pas à me contacter!

Merci Christophe !

interview réalisée en janvier 2023




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