7’’ – part 5 – CHARLIE FEATHERS – That Certain Female (et la France)

 

Pour continuer cette série, je me suis amusé à regarder dans ma discothèque quels étaient les 7’’ double siders (les singles avec deux faces géniales, si vous préférez), excluant de fait Phil Spector – il y a bien « The Screw » des Crystals, mais c’est un single parts 1 & 2. J’ai aussi éliminé les artistes dont on a déjà beaucoup parlé sur le blog, comme Dan Penn, Rocky Erickson (ah, ce premier single des Spades !), les Gories, Iggy, Pistols, … et les autres artistes pour lesquels j’ai déjà rédigé quelque chose dans une autre rubrique.

Exit aussi ceux dont tout le monde a déjà parlé ailleurs, comme Dylan, Elvis, le Velvet, les kinks, les Ramones …

Les Stones et les Troggs font par ailleurs l’objet de livres complets « seveninches », respectivement par Didier Balducci et Alain Feydri.

J’ai finalement sélectionné une cinquantaine de 7’’ qui me paraissent essentiels, qui ont même amélioré ma vie, dont Charlie Feathers, qui va m’intéresser, voire nous intéresser, ici.

Charlie est un des pionniers du R’n’R / rockabilly, le roi du hiccup. Il a longuement été sous-estimé, y compris par Sam Phillips de Sun, où Charlie a commencé sa carrière, bien avant Elvis, pour qui il a écrit « I Forgot To Remember To Forget », B side du single « Mystery Train » (1955).

J’ai choisi le single « That Certain Female / She Set Me Free », deux titres affolants sorti sur Rollin’ Rock en 1974. Ça aurait pu être quasiment n’importe quel autre de ses singles, tous géniaux, toutes périodes confondues : 1955 à la fin, Charlie nous ayant quitté en 1998.

Le single a fait l’objet de deux rééditions US et d’un bootleg UK en 2016.

Dans l’épisode précédent (Sonics), je précisais que c’était le dernier avec connexion Cramps. En fait, Charlie Feathers était le chanteur favori de Lux. Désolé. Les Cramps ont aussi bien sûr repris « Can’t Harrdly Stand It », avec ses hoquètements d’outre-tombe, et se sont inspirés de « One Hand Loose » pour composer « Creature From The Black Leather Lagoon ».

Les deux morceaux « That Certain Female » et « She Set Me Free » ont été composés par Charlie et montre plusieurs facettes de son timbre de voix incroyable. Ils ont été produits par Ronny Weiser, directement dans son salon. Ronny, d’origine italienne, est le créateur du label et magazine US Rollin’ Rock.

Charlie est accompagné pour ce single par son fils Bubba à la lead guitar et par Ronny Weiser aux percussions. Lui se charge de la basse, et du chant bien entendu.

That Certain Female



Charlie désespère de trouver la petite femme de ses rêves.

Well, ah huh-uh-uh-huh, oooow! Yeah!

Well I'm a just a single fella
With a lot on my mind
And I'm a lookin' for me a woman
But she's mighty hard to find
Oh, I asked my country cousin
Check the hottest spots in town
Oh that little-bitty woman
Well she just ain't around
Ooww! Hey, hey, ho!
Oh I'm lookin', lookin'
Searchin' high and low
Don't want to miss a spot
Keep it on the go
Waitin', watchin'
This woman's gotta show
I need this little bitty woman
How much you'll never know
OOOOOOWW!!
Yes! Do it!
Do it twice! Woo!

Where's she hangin' out
Lost this little bitty woman, she's just outta sight
Oh ho ho Ho!
Oh I'm lookin', lookin'
lCheckin' high an'low
Don't want to miss'a spot
Keep it on the go
Waitin', watchin'
That woman, she's gonna show
I need this little bitty woman
How much you'll ever know...
Ooohhh... Now...
I just need a simple
Where she's hanging out
I promise to make it worth your while
If you mark her out
Name your price and make it fast
Waited much too long
Got that woman on the mind
I'm gonna bring her home
OH YEAH!

Oh I'm lookin', lookin'
Searchin' high and low
OW!
Don't want to miss a spot
Keep it on the go
Waitin', watchin'
This woman, she gonna show
I need this little bitty woman
How much you'll ever know
Baby, I need you...
How much you'll never know
ord, I need this little bitty woman
ow much you'll never know!
Owww!

Le morceau a été utilisé pour la BO de « Kill Bill Vol. 1 » de Quentin Tarentino. Il a aussi fait figurer « Can’t Hardly Stand It » sur « Kill Bill Vol. 2 ».

« That certain Female » se trouve aussi en B side d’un bootleg US sur Kay Records, avec « Jungle Fever » en face A, morceau qui était effectivement sorti sur Kay en 1958, mais avec « Why Don’t You » sur la flip side.

Charlie a aussi enregistré (au moins) une version alternative de « That Certain Female ».

Je n’ai pas trouvé beaucoup de reprises de « That Certain Female ». Il y a un groupe rockab allemand (hello Christophe), Yann The Corrupted, qui reprend le morceau sur un album en 2014 et des versions live par les Flying Saucers, un groupe rockab anglais formé en 1972 et le Rhythm River Trio (2017).

Charlie Feather live

Charlie Feathers n’a donné qu’un seul concert en France, le 28 février 1987, organisé par l’association "The True Lovers of 50's Rock-n-Roll" et sponsorisé au moins par la boutique Sanino (Cf. l’affiche du concert ci-dessous), que je fréquentais fréquemment quand j’habitais près du Père-Lachaise. Je ne me souviens pas avoir vu de la promo pour ce show, et n’y ai donc pas assisté, too bad.

Il existe un CD, une édition privée (Peepin’ Eyes Records, 2002), qui indique « Live In Paris ‘87 ». Le concert a en fait eu lieu à Pontault Combault, en Seine et Marne, à la salle des fêtes. Il a été produit par Wanda Feathers , la fille de Charlie. Il existe quelques morceaux chantés en duo par Charlie et Wanda : « Two To Choose », « Knoxville Girl », ….

Toute sa vie ou presque Charlie a dû se contenter de petites salles de bistrots ou autres (salle des fêtes…). Parfois avec un de ses mentors, Junior Kimbrough, un autre artiste qui aurait mérité davantage de reconnaissance.

Les éditions privées seront une constante dans sa discographie, Charlie ayant créé son propre label, « Feathers Records » pour sortir ses disques dans les années 1970-80, dont ses deux premiers véritables LP, hors compiles en 1979 : « Volume 1 » et « Volume 2 ».

Ci-dessous toutes les infos concernant le show pontellois-combalusien, line-up, set list and more, que j’ai récupérés ici :
https://musicbrainz.org/release/09ee83de-4553-45ae-8ec7-1d939d319e51/cover-art



Que du bon, Charlie se réappropriant le « Folsom Prison Blues » de Johnny Cash – grand fan de Charlie, en transformant le morceau en un truc monstrueux de sauvagerie. Un peu comme « Roll Over Beethoven » (ou encore « Tear It Up », pas présent ici). Mes morceaux favoris de cette set list sont « Tongue Tied Jill » et « Strutterin’ Cindy ». Ce show peut se trouver sur Youtube.




Il y a un « Live In London » en 1990, sorti dix ans plus tard sur Kent Records. Charlie a également joué en Angleterre en 1984. Je ne sais pas s’il y a eu d’autres concerts ou tournées européens.

Discographie française

Il faudra attendre 1987 et New Rose pour voir une édition française sortir. Tout d’abord le mini LP « New Jungle Fever », avec trois morceaux de Charlie en face A, dont « Jungle Fever », son hit de 1958 revisité, et trois reprises en face B. Ah, cette version de « Roll Over Beethoven » que Charlie avait déjà reéinterprété deux fois sur ses singles 70’s. L’album « Honky Tonk Man » est sorti l’année suivante, avec, trois titres encore de Charlie et, cette fois-ci cinq reprises. Il y a sa fille Wanda dans les chœurs et son fils Bubba à la guitare.

Les photos de covers des deux albums ont été prises par Tav Falco. Ceux -ci ont été compilés sur un CD, sorti sur New Rose en 1988, puis sur Last Call en 2014, avec une cover différente, cette dernière édition bénéficiant d’un livret avec notamment des notes de pochette par Lux Interior, qui déclare :

« Je pourrais parler de Charlie Feathers indéfiniment, mais il est impossible d'expliquer sa grandeur. Il est absolument unique. Il faut l'entendre pour comprendre ce que je veux dire (get the picture).
Dans les années 50, il a été l'un des inventeurs du rock'n'roll. Dans les années 80, il a continué de l'inventer et de le définir. Il semble aussi avoir viré de plus en plus étrange et pervers au fil des ans. Il parle comme un bébé, gazouille, hoquette, gémit et halète (baby-talks, chirps, hiccups, moans and gasps) tout au long d'une chanson, jusqu'à ce qu'elle devienne un petit monde à part. Sa version de « Roll Over Beethoven » est tellement étrange et menaçante qu'on a l’impression que c’est la toute première fois qu’on entend cette chanson.
Charlie est un sacré (mad) magicien et il connaît tous les tours. Mais plutôt que de me croire sur parole, achetez donc ce disque !
 »

She Set Me Free

  

Là, c’est la fille qui l’a quitté. Il a pourtant tout essayé pour qu’elle reste avec lui.

Les paroles disent à peu près ça (déchiffrées, pas trouvées), hors onomatopées :

Well, I’m walkin’ down the road with a worried mind
Thumb in the air, tryin’ to get me a ride.
Well I wonder if she still loves me
I love her but she set me free

Babyyyyyyyyyy, baby
Oh baby
I'm gettin' lost here, I know
I got no place to go. Ha ha ha.
I need baby.
Well, from her lips
Honey flows
And that’s where all my lovin' it goes.

I told her she was gonna have it bad
Now I pitched in, I gave her everything I had
You know, she wouldn't listen, she'll have a hard time
And she'll be walkin' round beggin' for the pennies, nickels and dimes. (What? Yeah)

Pas de reprises de ce superbe morceau à ma connaissance.

Mais que font les rockers ?

Patrick Bainée

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