RÉTROVISEUR 4 : WHO… STOCK GENERATION !


Le 9 septembre 1972 un ouragan s’abat sur la région parisienne lors de la fête annuelle de l’Humanité à la Courneuve avec le concert événementiel des Who interrompu par une odieuse panne d’électricité !

Roger Daltrey (chant), Pete Townshend (guitare), John Entwistle (basse) et Keith Moon (batterie) succèdent à Golden Earring et Country Joe Mc Donald sur la grande scène devant plus de cent mille personnes. D’emblée « I Can’t Explain » nous plonge dans les origines du quatuor. Puis c’est leur fabuleuse reprise de « Summertime Blues » d’Eddie Cochran. Roger lance son micro toujours plus haut et le récupère avec une incroyable habileté. Dans des sauts improbables, la guitare Les Paul de Pete virevolte en tous sens. « The Ox », alias John, s’approche du micro et interprète une de ses compositions, « My Wife », avec Roger Daltrey.


La foule est de plus en plus excitée pendant que les Who se déchaînent tels des diables indomptés. Tandis que John, imperturbable, assure tel un métronome, Keith prouve à la fois ses qualités indéniables de batteur d’exception et de clown. Voir réuni en un seul groupe, l’un des bassistes les plus exceptionnels, John Entwistle, associé à l’un de plus grands batteurs au monde, Keith Moon, est déjà fantastique. Mais, outre que vous obtenez la section rythmique la plus détonante, vous avez droit à un bassiste au flegme insolent face à un batteur fou qui ne s’embarrasse pas de démonstrations dans des solos à rallonge. Ces deux personnages ont de quoi surprendre et ils ne représentent que la moitié du groupe !

Dans l’autre partie, on a affaire à Pete Townshend, un des compositeurs les plus talentueux doublé d’un guitariste de haute voltige, aussi bien musicalement que physiquement. Il occupe le devant de la scène avec Roger Daltrey, chanteur et showman hors pair, en compétition avec Mick Jagger pour ce titre, à la voix extraordinaire, et au jeu de scène époustouflant. Le tout donne les Who, plus grand groupe rock au monde avec… les Rolling Stones !


La machine est lancée, les instruments crépitent et les Who enchaînent leurs classiques à une vitesse folle : « Baba O’Riley », « Bargain », le trépidant « Magic Bus », « Won’t  Get Fooled Again », «Pinball Wizard » et « Tommy Can You Hear Me » du double album « Tommy », l’hymne « My Generation », « Behind Bue Eyes », « Relay » une nouveauté, etc. Parfois, dans le feu de l’action, Pete, d’un bon gigantesque se propulse sur l’exubérant Roger qui brandit son micro. Quand, tout à coup, à dix-neuf heures vingt, c’est la maudite panne de courant. Au bout d’une heure de vingt de spectacle à la cadence infernale, on est frustré dans l’attente de leur dernier tube emblématique « Join Together (In The Band) » et d’autres encore.

En effet, comme nous l’a confié Roger avant le show, les Who avaient l’intention de jouer deux heures. Ça ne faisait d’ailleurs aucun doute vu la joie évidente qu’ils montraient à se produire devant un public enthousiaste, en transe tout comme eux. C’est dans une ambiance indescriptible que tout le monde se lève pour écouter Pete annoncer au porte-voix qu’ils retournent dans les loges et qu’ils reviendront si l’électricité est rétablie. Malheureusement ce n’est pas le cas. Avec Mike Lécuyer, Alain Lemaire et le photographe Philippe Frin, l’équipe de Pop 2000 et Maxipop, je me balade dans les coulisses en plein air, derrière la scène, aux côtés de Roger Daltrey, Pete Townshend, John Entwistle et Keith Moon. Alors que la pluie menace de faire des siennes (clin d’œil dont on aurait pu se passer au festival américain de Woodstock en août 1969), avec humour, Pete fait la réflexion suivante : « Il fait tout de même plus beau en Angleterre ! ». Si cette coupure de courant est une formidable injustice, cela n’entame en rien la suprématie des Who dont la prestation me laisse sur les genoux !

Jacques LEBLANC

Juke Box Magazine

















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