ROCK LIBRARY - PHILIPPE THIEYRE – ÉRUDIT ROCK, DE LA LIBRAIRIE "PARALLÈLES" À "ROCK & FOLK" - 1ÈRE PARTIE
J’ai découvert Philippe Thieyre à travers le fanzine online "Vapeur Mauve". Ses livres y étaient régulièrement cités comme références sur le rock psychédélique. Ils le sont également pour moi et ne font pas maigre figure face à ceux venant de l’autre côté de la Manche ou de l’Atlantique. Il vient de sortir un nouvel ouvrage sur le sujet, "Le Rock psychédélique en 150 figures" (éditions du Layeur), l’occasion pour un entretien.
De quelle ville venez-vous, avez-vous vécu dans différents pays ?
Comme mon nom l’indique, ma famille est corrézienne depuis toujours et je suis la première génération à être né à Paris. En 2006, je suis parti pour Rochefort après la création du festival et en 2013 pour le sud Gironde.
J’ai un peu voyagé dans différents pays. Sinon, j’ai vécu deux ans au Maroc (Nador) comme enseignant à la place du service militaire que je ne voulais pas faire.
Dans votre famille. Est-ce-que la musique était importante ?
Pas particulièrement.
Quel est votre parcours musical et comment avez-vous basculé vers le monde du rock, je crois savoir que tout a commencé avec Bob Dylan et les Animals ?
Comme beaucoup de jeunes de mon époque, mon parcours a commencé par la radio. D’abord avec la variété pop, puis le rock à partir de 12/13 ans avec Presley, Gene Vincent. Un premier virage important est survenu quand mes parents ont loué avec un ami une petite maison en Normandie, pas très loin de Dieppe. Et, là, lors des week-ends, je pouvais capter les radios anglaises (Radio Caroline, BBC) et écouter, en dehors des Beatles et des Stones, le Spencer Davis Group, les Kinks, les Them, les Pretty Things et tout le British Beat Mes parents m’ont offert mon premier album, Les Beatles dans leurs 14 plus grands succès, puis je me suis acheté un EP des Animals et Well Respected Kinks une compilation à bas prix des Kinks. « Like A Rolling Stone » est une des chansons qui m’a le plus marqué. J’ai découvert quelque chose de différent et un autre univers. Un peu plus tard, le Pop Club de José Arthur sur France Inter est devenu mon émission de référence. En charge de la partie musicale à cette période, Pierre Lattès avait créé Bouton Rouge à la télé, malheureusement supprimé en mai 1968. Dans un autre style, Pop 2 prendra la suite.
Je me suis plongé dans le British Blues, notamment les Bluesbreakers de John Mayall, Fleetwood Mac avec Peter Green, Steamhammer et, en premier Ten Years After. En remontant aux sources de ce mouvement, je me suis intéressé aux bluesmen américains, en particulier le Chicago Blues sans oublier des artistes Soul. Frank Zappa, Marvin Gaye, John Coltrane, le Velvet Underground, les Stooges (The Stooges), les Doors, Quicksilver Messenger Service, John Martyn, Tim Buckley occupent aussi une place prépondérante. D’autre part, j’ai toujours fonctionné par un système de connexions entre les musiciens et les styles musicaux. Je découvrais un musicien, qui me connectait à un autre et ainsi de suite. Il m’arrivait d’acheter un disque simplement pour une référence à un nom que je connaissais, surtout quand il était soldé ou d’occasion. Les articles de chroniqueurs comme Jean-Pierre Lentin (Actuel) ou des signatures de Rock & Folk m’ont souvent permis des découvrir des artistes marginaux, peu connus. Autant j’ai assisté à de nombreux concerts de groupes de rock progressifs, par exemple Yes ou King Crimson avant la sortie de leurs albums, autant c’était plus rare pour le psychédélisme, les formations américaines tournant moins sur notre territoire et les disques plus difficiles à se procurer. Ainsi, les premiers émois psychédéliques survinrent avec Pink Floyd et Quicksilver Messenger Service, Happy Trails.
De 1980 jusqu’en 2006, j’ai travaillé ou plutôt j’ai fait partie du collectif de la librairie Parallèles, dont j’étais déjà client, où des milliers de disques de toutes les époques ont transité par mes mains ainsi que des livres.
Vous avez fait des émissions radio sur France Inter avec Laurence Pierre, Alternatives et Addictions, pourriez-vous nous en préciser le concept, votre apport au tout et des souvenirs marquants ? Comment choisissiez-vous les morceaux diffusés, y avait-il des interdictions ou de l’auto censure dans vos choix ?
Un jour, Laurence Pierre a demandé à Parallèles si l’un d’entre nous voulait chroniquer un ou deux livres tous les mois dans son émission Alternatives, puis se sont ajoutées deux chroniques de disques (nouveautés). Finalement, j’ai occupé le poste en permanence. Changement dans les dernières années d’Addictions, toutes les trois ou quatre semaines, pendant la moitié de l’émission, je présentais une sélection de morceaux singuliers, souvent peu ou mal connus, anciens ou récents, choisis dans ma discothèque vinylique. Je choisissais le thème s’il y en avait un, et les morceaux selon l’inspiration du moment ou parfois liés à une actualité. Avec Laurence et le réalisateur, on les calait. Aucune autocensure, ni censure. Un seul titre m’a été refusé à la diffusion : I Trawl The Megahertz de Paddy McAloon, 22 minutes de récitatif sur un rythme lancinant et monocorde. Superbe, mais peut-être un peu long pour empêcher les auditeurs d’Inter de s’endormir.
Comment avez-vous commencé à écrire et quel est votre rapport à l'écriture ?
Mon premier texte publié était un article sur John Martyn dans Nineteen. Sinon, j’ai étudié les lettres classiques, mais, comme au moment de ma maitrise, Le voleur de Georges Darien, roman anarchiste, j’étais DJ dans une boîte de nuit, je ne l’ai jamais terminée. L’après-midi, je préférais fouiner chez les disquaires et les libraires. J’ai aussi suivi des cours de cinéma.
Comment avez-vous intégré JBM et Rock & Folk, pourriez-vous nous en expliquer la différence dans l’approche de la musique ? Aviez-vous un autre métier ou pouviez-vous en vivre ?
Je n’ai pas intégré Juke-box. A Parallèles, nous avions déjà édité des agendas rock, notamment un New-wave, dont j’avais écrit les textes et récupéré les photos. Une année, nous avons eu l’idée d’en consacrer un au psychédélisme, mais le coût s’est avéré trop lourd pour un agenda et nous avons transformé le projet initial en un livre. Celui-ci n’étant pas encore écrit, Jacques Leblanc, le patron de Juke-box, magazine que nous avons un temps coédité, nous a proposé une parution sous la forme d’une rubrique mensuelle, un feuilleton en quelque sorte.
Après la sortie des deux tomes du Rock psychédélique américain, en 1994, Philippe Manœuvre m’a proposé d’écrire un article, puis de prendre en charge la rubrique Erudit rock.
Juke-box est destiné aux collectionneurs rock, yé-yé, pop variétés, Rock & Folk à un public plus large et plus centré sur le rock et son récit que sur les nomenclatures, avec des articles aussi bien sur les nouveautés que sur les productions passées.
A moins de se démultiplier dans tous les sens, vivre des revenus d’un pigiste pour des publications consacrées uniquement à la musique est un fantasme. Je vivais de mon travail à Parallèles.
Quel était le système de fonctionnement pour écrire un article dans ces journaux (Commande d'article, temps de réalisation, limite de place ou liberté totale etc.) ?
Pensez-vous que la presse rock a encore une utilité aujourd'hui, quel est à votre avis son avenir ?
En dehors de piges ponctuelles, je n’écris régulièrement que pour R&F. Comme pour tous les journaux, mensuels en l’occurrence, soit je proposais un sujet, soit la rédaction m’en proposait un qu’il fallait rendre avant le bouclage, entre deux et trois semaines. Le nombre approximatif de signes est toujours déterminé à l’avance. En général, j’avais la liberté d’écrire ce que je voulais dans le cadre du sujet. Mes articles sont rarement corrigés à l’exception de quelques retouches après relecture, ce qui est indispensable.
Outre la qualité de l’écriture, c’est cette relecture qui, entre autres, différencie un bon magazine de blogs écrits la plupart du temps dans un français approximatif. Ceci dit, dans mes pérégrinations sur internet, outre certains sites, j’apprécie particulièrement les blogs de véritables archivistes du rock centrés sur les références, les interviews et des textes concis sans verbiage inutile, tels que ceux qui évoquent des formations garage rock ayant sorti trois 45-tours au fin fond de l’Ohio ou comme celui, très complet et véritable mine, de Stefan Wirz dédié, en grande partie, au blues avec, là aussi, des reproductions des disques et des pochettes. D’après ce que j’ai rapidement pu voir, votre site, qui me semble bien fait, appartient à la première catégorie.
Sinon, je reste très attaché à la presse papier, journal, fanzine ou magazine, que je peux lire où je veux en toute liberté sans avoir recours à une machine. D’un autre côté, si acheter un journal a l’avantage d’être anonyme et de ne pas laisser de traces, un blog a l’avantage d’avoir un espace infini et l’inconvénient du délayage. D’autre part, grâce à internet, un lecteur du Rock psychédélique en 150 figures peut découvrir des chansons, même avec une qualité sonore moyenne ou mauvaise, d’une grande majorité des artistes présentés et décider ou pas de se procurer l’album alors qu’à mon époque, nous aurions dû acheter le disque ou l’emprunter.
Je précise que je n’ai pas de smartphone.
La presse rock a encore une utilité, même si son audience est plus limitée et ses tirages bien moins importants. Ce qui est le cas pour les autres magazines. R&F n’aurait sans doute pas survécu s’il ne faisait pas partie d’un groupe de presse. Malgré un lectorat légèrement rajeuni, l’avenir à long terme peut paraître assez sombre dans un monde dominé par les GAFA, les normes et un capitalisme de plus en plus débridé d’autant que les frais d’impression et de distribution sont élevés.
Ces derniers temps, il s’est avéré que la dématérialisation avait ses limites. Le désir d’avoir un objet entre les mains revient. Ainsi, il y a plusieurs années, plusieurs camarades de Parallèles et en dehors estimaient que continuer à vendre des vinyles était dépassé, que les albums vinyles allaient disparaître. J’ai combattu cette idée.
Est-ce-que la rédaction vous prenait beaucoup de temps, comment vous documentez vous ?
Dans un reportage télé, vous avez déclaré il y a quelques années vérifier toute information plusieurs fois avant de la publier. Vous travaillez pour Rock & Folk, qui a beaucoup aimé créer des légendes. N’est-ce pas beaucoup de travail pour rétablir les vérités dans Erudit Rock ?
Pratiquement tous les journalistes, dans tous les domaines, préfèrent la légende, pas plus R&F que d’autres.
Jusqu’à la première phrase écrite, la préparation me prend déjà beaucoup de temps d’autant qu’il est facile de laisser son esprit divaguer. Les vérifications occupent également une grande part de mon activité, souvent pour un détail que personne ne remarquera à la lecture, aussi bien pour un article que pour un livre. C’est presque déontologique. Il ne suffit pas de recopier ou de prendre pour argent comptant ce qui a déjà été écrit. Par exemple, lors de l’écriture du Rock psychédélique américain, j’ai retrouvé la date du premier concert du Grateful Dead sous ce nom après avoir recherché l’affiche dans des livres. Le Rock psychédélique en 150 figures m’a ainsi demandé seize mois de travail en parallèles à mes autres activités.
Trouver et placer le mot juste dans une phrase, du moins celui qui me convient, me prend également du temps, et je relis mes textes avec un recul de deux ou trois jours.
Quant à la documentation, les notes sur les pochettes de disques, les fanzines, les magazines, surtout anglophones (à Parallèles, nous importions plusieurs revues des USA et de UK, dont j’ai conservé un certain nombre) et les livres sont mes principales sources auxquelles il faut rajouter internet pour dénicher des infos récentes. Avant, j’écrivais à la main sur des feuilles doubles. L’utilisation de l’ordinateur permet de reprendre et de corriger incomparablement plus facilement un texte et de pouvoir l’envoyer tel quel.
(À suivre ...)
Deuxième partie de l'interview
De quelle ville venez-vous, avez-vous vécu dans différents pays ?
Comme mon nom l’indique, ma famille est corrézienne depuis toujours et je suis la première génération à être né à Paris. En 2006, je suis parti pour Rochefort après la création du festival et en 2013 pour le sud Gironde.
J’ai un peu voyagé dans différents pays. Sinon, j’ai vécu deux ans au Maroc (Nador) comme enseignant à la place du service militaire que je ne voulais pas faire.
Dans votre famille. Est-ce-que la musique était importante ?
Pas particulièrement.
Quel est votre parcours musical et comment avez-vous basculé vers le monde du rock, je crois savoir que tout a commencé avec Bob Dylan et les Animals ?
Comme beaucoup de jeunes de mon époque, mon parcours a commencé par la radio. D’abord avec la variété pop, puis le rock à partir de 12/13 ans avec Presley, Gene Vincent. Un premier virage important est survenu quand mes parents ont loué avec un ami une petite maison en Normandie, pas très loin de Dieppe. Et, là, lors des week-ends, je pouvais capter les radios anglaises (Radio Caroline, BBC) et écouter, en dehors des Beatles et des Stones, le Spencer Davis Group, les Kinks, les Them, les Pretty Things et tout le British Beat Mes parents m’ont offert mon premier album, Les Beatles dans leurs 14 plus grands succès, puis je me suis acheté un EP des Animals et Well Respected Kinks une compilation à bas prix des Kinks. « Like A Rolling Stone » est une des chansons qui m’a le plus marqué. J’ai découvert quelque chose de différent et un autre univers. Un peu plus tard, le Pop Club de José Arthur sur France Inter est devenu mon émission de référence. En charge de la partie musicale à cette période, Pierre Lattès avait créé Bouton Rouge à la télé, malheureusement supprimé en mai 1968. Dans un autre style, Pop 2 prendra la suite.
Philippe Thieyre en 2018 |
De 1980 jusqu’en 2006, j’ai travaillé ou plutôt j’ai fait partie du collectif de la librairie Parallèles, dont j’étais déjà client, où des milliers de disques de toutes les époques ont transité par mes mains ainsi que des livres.
Vous avez fait des émissions radio sur France Inter avec Laurence Pierre, Alternatives et Addictions, pourriez-vous nous en préciser le concept, votre apport au tout et des souvenirs marquants ? Comment choisissiez-vous les morceaux diffusés, y avait-il des interdictions ou de l’auto censure dans vos choix ?
Un jour, Laurence Pierre a demandé à Parallèles si l’un d’entre nous voulait chroniquer un ou deux livres tous les mois dans son émission Alternatives, puis se sont ajoutées deux chroniques de disques (nouveautés). Finalement, j’ai occupé le poste en permanence. Changement dans les dernières années d’Addictions, toutes les trois ou quatre semaines, pendant la moitié de l’émission, je présentais une sélection de morceaux singuliers, souvent peu ou mal connus, anciens ou récents, choisis dans ma discothèque vinylique. Je choisissais le thème s’il y en avait un, et les morceaux selon l’inspiration du moment ou parfois liés à une actualité. Avec Laurence et le réalisateur, on les calait. Aucune autocensure, ni censure. Un seul titre m’a été refusé à la diffusion : I Trawl The Megahertz de Paddy McAloon, 22 minutes de récitatif sur un rythme lancinant et monocorde. Superbe, mais peut-être un peu long pour empêcher les auditeurs d’Inter de s’endormir.
Comment avez-vous commencé à écrire et quel est votre rapport à l'écriture ?
Mon premier texte publié était un article sur John Martyn dans Nineteen. Sinon, j’ai étudié les lettres classiques, mais, comme au moment de ma maitrise, Le voleur de Georges Darien, roman anarchiste, j’étais DJ dans une boîte de nuit, je ne l’ai jamais terminée. L’après-midi, je préférais fouiner chez les disquaires et les libraires. J’ai aussi suivi des cours de cinéma.
Comment avez-vous intégré JBM et Rock & Folk, pourriez-vous nous en expliquer la différence dans l’approche de la musique ? Aviez-vous un autre métier ou pouviez-vous en vivre ?
Je n’ai pas intégré Juke-box. A Parallèles, nous avions déjà édité des agendas rock, notamment un New-wave, dont j’avais écrit les textes et récupéré les photos. Une année, nous avons eu l’idée d’en consacrer un au psychédélisme, mais le coût s’est avéré trop lourd pour un agenda et nous avons transformé le projet initial en un livre. Celui-ci n’étant pas encore écrit, Jacques Leblanc, le patron de Juke-box, magazine que nous avons un temps coédité, nous a proposé une parution sous la forme d’une rubrique mensuelle, un feuilleton en quelque sorte.
LE ROCK PSYCHÉDÉLIQUE AMÉRICAIN 1 |
Juke-box est destiné aux collectionneurs rock, yé-yé, pop variétés, Rock & Folk à un public plus large et plus centré sur le rock et son récit que sur les nomenclatures, avec des articles aussi bien sur les nouveautés que sur les productions passées.
A moins de se démultiplier dans tous les sens, vivre des revenus d’un pigiste pour des publications consacrées uniquement à la musique est un fantasme. Je vivais de mon travail à Parallèles.
Quel était le système de fonctionnement pour écrire un article dans ces journaux (Commande d'article, temps de réalisation, limite de place ou liberté totale etc.) ?
Pensez-vous que la presse rock a encore une utilité aujourd'hui, quel est à votre avis son avenir ?
En dehors de piges ponctuelles, je n’écris régulièrement que pour R&F. Comme pour tous les journaux, mensuels en l’occurrence, soit je proposais un sujet, soit la rédaction m’en proposait un qu’il fallait rendre avant le bouclage, entre deux et trois semaines. Le nombre approximatif de signes est toujours déterminé à l’avance. En général, j’avais la liberté d’écrire ce que je voulais dans le cadre du sujet. Mes articles sont rarement corrigés à l’exception de quelques retouches après relecture, ce qui est indispensable.
Outre la qualité de l’écriture, c’est cette relecture qui, entre autres, différencie un bon magazine de blogs écrits la plupart du temps dans un français approximatif. Ceci dit, dans mes pérégrinations sur internet, outre certains sites, j’apprécie particulièrement les blogs de véritables archivistes du rock centrés sur les références, les interviews et des textes concis sans verbiage inutile, tels que ceux qui évoquent des formations garage rock ayant sorti trois 45-tours au fin fond de l’Ohio ou comme celui, très complet et véritable mine, de Stefan Wirz dédié, en grande partie, au blues avec, là aussi, des reproductions des disques et des pochettes. D’après ce que j’ai rapidement pu voir, votre site, qui me semble bien fait, appartient à la première catégorie.
LE ROCK PSYCHÉDÉLIQUE AMÉRICAIN 2 |
Sinon, je reste très attaché à la presse papier, journal, fanzine ou magazine, que je peux lire où je veux en toute liberté sans avoir recours à une machine. D’un autre côté, si acheter un journal a l’avantage d’être anonyme et de ne pas laisser de traces, un blog a l’avantage d’avoir un espace infini et l’inconvénient du délayage. D’autre part, grâce à internet, un lecteur du Rock psychédélique en 150 figures peut découvrir des chansons, même avec une qualité sonore moyenne ou mauvaise, d’une grande majorité des artistes présentés et décider ou pas de se procurer l’album alors qu’à mon époque, nous aurions dû acheter le disque ou l’emprunter.
Je précise que je n’ai pas de smartphone.
La presse rock a encore une utilité, même si son audience est plus limitée et ses tirages bien moins importants. Ce qui est le cas pour les autres magazines. R&F n’aurait sans doute pas survécu s’il ne faisait pas partie d’un groupe de presse. Malgré un lectorat légèrement rajeuni, l’avenir à long terme peut paraître assez sombre dans un monde dominé par les GAFA, les normes et un capitalisme de plus en plus débridé d’autant que les frais d’impression et de distribution sont élevés.
Ces derniers temps, il s’est avéré que la dématérialisation avait ses limites. Le désir d’avoir un objet entre les mains revient. Ainsi, il y a plusieurs années, plusieurs camarades de Parallèles et en dehors estimaient que continuer à vendre des vinyles était dépassé, que les albums vinyles allaient disparaître. J’ai combattu cette idée.
Est-ce-que la rédaction vous prenait beaucoup de temps, comment vous documentez vous ?
Dans un reportage télé, vous avez déclaré il y a quelques années vérifier toute information plusieurs fois avant de la publier. Vous travaillez pour Rock & Folk, qui a beaucoup aimé créer des légendes. N’est-ce pas beaucoup de travail pour rétablir les vérités dans Erudit Rock ?
Pratiquement tous les journalistes, dans tous les domaines, préfèrent la légende, pas plus R&F que d’autres.
Jusqu’à la première phrase écrite, la préparation me prend déjà beaucoup de temps d’autant qu’il est facile de laisser son esprit divaguer. Les vérifications occupent également une grande part de mon activité, souvent pour un détail que personne ne remarquera à la lecture, aussi bien pour un article que pour un livre. C’est presque déontologique. Il ne suffit pas de recopier ou de prendre pour argent comptant ce qui a déjà été écrit. Par exemple, lors de l’écriture du Rock psychédélique américain, j’ai retrouvé la date du premier concert du Grateful Dead sous ce nom après avoir recherché l’affiche dans des livres. Le Rock psychédélique en 150 figures m’a ainsi demandé seize mois de travail en parallèles à mes autres activités.
Trouver et placer le mot juste dans une phrase, du moins celui qui me convient, me prend également du temps, et je relis mes textes avec un recul de deux ou trois jours.
Quant à la documentation, les notes sur les pochettes de disques, les fanzines, les magazines, surtout anglophones (à Parallèles, nous importions plusieurs revues des USA et de UK, dont j’ai conservé un certain nombre) et les livres sont mes principales sources auxquelles il faut rajouter internet pour dénicher des infos récentes. Avant, j’écrivais à la main sur des feuilles doubles. L’utilisation de l’ordinateur permet de reprendre et de corriger incomparablement plus facilement un texte et de pouvoir l’envoyer tel quel.
(À suivre ...)
Deuxième partie de l'interview
Troisième partie de l'interview
Interview réalisée en février 2022 (Merci d'avance pour vos commentaires !)
Interview réalisée en février 2022 (Merci d'avance pour vos commentaires !)
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