LES LOU'S - INTERVIEW TOLLIM TOTO: BERNIE RHODES ESPERAIT NOUS FAIRE SIGNER AVEC CBS ANGLETERRE

 

Lou's au Gibus. De gauche à droite: Tollim ToTo, Pamela Popo, Raphaëlle Devins. Crédit photo DR

Bonjour Tollim ToTo, tout d’abord merci de répondre à quelques questions pour notre blog. Premièrement, que signifie ce pseudonyme, Tollim Toto ?

C’est juste mon nom de famille à l’envers et son diminutif.

Lou’s signifiait-il vraiment loubardes ?

Raphaëlle a peut-être voulu créer un personnage quand elle a déclaré à Alain Pacadis que nous étions des loubardes qui jouions du rock. Ou peut-être se percevait-elle ainsi. Je n’avais qu’une mobylette, un peu risible pour une loubarde. Disons qu’on était un peu rebelles. C’est Sacha - Saskia qui a trouvé ce nom, et à vrai dire, on ne lui a jamais demandé ce qu’il signifiait, on trouvait que ça sonnait bien.

Comment a eu lieu la rencontre qui a donné les Lou’s ? Il se raconte que c’était à Harry Cover. C'est vrai ?

Inexact. Pamela Popo (Odile Paulhac) et moi on s’était rencontrées en terminale. Comme on essayait de former un groupe, lors d’une soirée, la musicienne Elodie Lauten nous a conseillé de former un groupe féminin et de contacter Sacha, qui jouait de la batterie.

Quelles étaient tes influences musicales à l'époque ?

A l’époque, avec Pam, on écoutait les Who, Lou Reed, Doctor Feelgood, “Ziggy Stardust”, des amis nous ont fait découvrir Bob Marley, Alain Pacadis nous a fait écouter les Ramones, Patti Smith...

Les autres Lou’s avaient les mêmes goûts musicaux ?

Sacha répétait dans la cave de l’Open Market, le magasin de disques de Marc Zermati, elle avait donc eu accès à toutes les nouveautés. Un jour Raphaëlle nous a montré le premier disque du Clash en disant « voilà ce qu’il faut écouter maintenant ». On n’a pas été impressionnées plus que ça (rires).

Au festival de Mont-de-Marsan, pourquoi les Lou’s ont pu jouer deux fois ?

Marc Zermati a peut-être trouvé qu’on avait assuré le premier soir.

Des souvenirs, anecdotes de ces deux jours ?

On a sympathisé avec Captain Sensible des Damned, avec Little Bob.

Comment s’est faite la rencontre avec The Clash ?

A Mont-de-Marsan, Mick Jones est venu nous voir. Il a dit qu’il fallait que l’on travaille. Le Clash pensait qu’un groupe avait besoin de se roder avec une bonne trentaine de concerts. Après nous avoir « testées » à Reims, Bernard « Bernie » Rhodes m’a demandé si ça nous dirait de faire la première partie de la tournée du Clash en Grande-Bretagne en octobre.

Comment se sont déroulées les dates en Angleterre ? Vous aviez votre propre matériel et votre véhicule ?

Nous avions notre propre matériel et un Ford Transit que la mère de Raphaëlle avait acheté à crédit pour que nous puissions tourner. A vrai dire, on s’était fait voler tout notre matériel dans la camionnette en août et on a signé un contrat type les yeux fermés avec CBS France pour avoir une avance, racheter du matériel et partir en tournée. Ce fut une expérience formidable, qui nous a soudées musicalement, même si ce n’est pas toujours une zone de confort d’être en première partie devant un public impatient.

La compétition entre les groupes était-elle si rude qu’on veut bien le dire ?

Étant donné le niveau des musiciens en Angleterre, la barre était haut placée. Mais la période punk a permis à beaucoup de groupes de monter sur scène alors qu’ils n’avaient pas quatre ans de conservatoire derrière eux, donc il y avait une grande tolérance. Même si Subway Sect ou Penetration étaient plus connus, ils ne nous l’ont pas fait sentir lorsqu’on a tourné avec eux.

L'histoire avec Sid Vicious, c'est quoi exactement ? Il a vraiment volé les cordes de basse ?

Alors que les Banshees et les Lou’s partageaient une même loge à Music Machine à Londres et que les Lou’s s’étaient absentées, Sid Vicious est venu braquer le perfecto de Steven Severin sous la menace d’un couteau et il a volé une bandoulière de guitare des Lou’s. Notre roadie a cru que c’était la mienne, alors je suis partie à la poursuite de Sid Vicious en vain. En réalité, c’était celle de Raphaëlle, et quelques jours plus tard, il a fallu les séparer lors d’une soirée de nouvel an.

Si les Lou's s'étaient absentées, qui a vu Vicious voler les affaires? 

Notre roadie a été témoin de la scène

Bernie Rhodes vous a-t-il vraiment conseillé de quitter CBS France alors que Clash était sur cette compagnie ?

Le Clash avait signé avec CBS Angleterre, et Bernie Rhodes espérait nous faire signer avec CBS Angleterre également, mais ça ne s’est pas réalisé.

Quand et dans quel(s) studio(s) ont été enregistrés les titres qui figurent sur le EP Wild Fire et sur le single Macho Woman ?

Wild Fire a dû être enregistré live je ne sais où, No Escape à l’Olympia, Back in the Street en studio à Paris, Take a Ride dans les studios multimédias au sous-sol du centre Pompidou, ainsi que Macho Woman et We’ve been waiting too long.

D'autres titres ont-ils été enregistrés ?

Tous les titres disponibles ont été édités par Claude Picard.

Existe-t-il des enregistrements inédits des Lou’s aujourd'hui ? Si oui, que faudrait-il faire pour qu’ils voient le jour ?

Pathé Marconi avait enregistré tout le concert des Lou’s à l’Olympia, mais il y a des droits. Il y a également des bandes qui appartenaient à Marc Zermati.

Y a-t-il vraiment eu un deal avec Skydog pour un single (ou plus) ?

Comme on avait rompu notre contrat avec CBS France, on était « grillées », cependant, Marc Zermati nous a permis d’enregistrer un titre pour Skydog Commando.

Quelles étaient les relations avec Marc Zermati ?

Sacha était une amie de Marc Zermati. Il a été très amical quand nous lui avons demandé des conseils avant de signer un contrat pour les Rois Fainéants.

Est-ce que vous, les Lou's, aviez des contacts avec les autres groupes parisiens? Stinky Toys, Asphalt Jungle, Guilty Razors? Si oui, les relations étaient comment? 

Nous avions de bonnes relations avec Jacno, avec Hervé Zenouda, avec Ricky Darling…

Pourquoi le groupe a-t-il splitté ?

Alors qu’on était particulièrement solidaires depuis cette tournée avec le Clash, les relations se sont un peu dégradées, puis Sacha et Raphaëlle ont manifesté leur intention de vivre en Angleterre.

Après les Lou's, tu as fait les Rois Fainéants avec Pamela Popo. Quelle a été la suite, tu as fait quoi, après ?

Pam et moi avons continué la musique pour le fun, elle m’a également donné des cours de guitare pendant dix ans, jusqu’à son décès en juin 2022. Pam me manque beaucoup.

Sur le plan professionnel, j’ai longtemps travaillé comme journaliste, secrétaire de rédaction. J’avais démarré dans la presse comme coursière, mais j’ai pu suivre des formations.

Les Lou’s n’ont jamais eu envie de se reformer ?

Raphaëlle nous avait proposé en 1987 de se reformer le temps d’une tournée, mais je travaillais à plein temps à l’époque tout en suivant une formation.

Sacha de Jong au Gibus. Crédit photo DR
Que fait Tollim Toto aujourd'hui ?

Je suis en quatrième année de doctorat en histoire des Etats-Unis.

Quels souvenirs gardes-tu de cette époque ?

De bons souvenirs car le punk a permis à beaucoup de musiciennes de s’affirmer, dans un univers jusqu’alors plutôt masculin.

As-tu gardé des contacts avec Sacha de Jong ?

J’ai réussi à reprendre contact avec Sacha après la parution de Wild Fire, grâce à Claude Picard qui m’a donné les coordonnées de Herman de Tollenaere.

Merci beaucoup d'avoir répondu à nos questions.

Les Monstres Sacrés

(Photos des Lou's fournies par Tollim ToTo)



Commentaires